Dans les interstices du 19ème siècle, notre temps retrouve depuis peu intérêt à repêcher des artistes négligés dont la mémoire raconte autrement l’histoire, comble des espaces laissés en friche par les panthéons. Parmi ces oubliés, rares sont ceux qui auront laissé une trace aussi plurielle que Maurice Dudevant (1823-1889) qui signera Maurice Sand en usant du pseudonyme de sa mère Aurore Dupin dite George Sand. Abondante, l’archive de son parcours aurait permis de le découvrir au jour le jour, traversant le siècle par les multiples portes disponibles à un être créateur : dessin, peinture, écriture, théâtre, histoire, science, et même une pointe d’industrie. Mais cette archive est demeurée inerte.

Illustrateur, peintre, dessinateur,

Maurice Sand obéit certes à des commandes mais lorsqu’il écoute sa propre voix, c’est sur des notions ethnologiques ou botaniques vérifiées qu’il pose le voile terrifiant de légendes, l’inquiétante étrangeté des paysages, les craintes des paysans.

Homme de théâtre,

il remonte et écrit l’histoire de la Commedia dell’arte jusqu’à la pointe des costumes et des types pour y trouver les contours de ses propres acteurs, marionnettes descendantes imaginaires des atellanes, servies par une science nouvelle de la scène.

Écrivain,

il crée des situations fantastiques en pigeant dans la préhistoire, dans l’histoire, dans les sciences naturelles, il s’attarde à en faire la démonstration, à en utiliser le vocabulaire et les références. Il s’amuse par là à créer de l’incroyable tout en ne se rendant jamais à une conclusion sans pulvériser les mystères.

Homme de sciences naturelles de toutes sortes,

il s’acharne à construire les classements et à rédiger les descriptions savantes prisées des académies qu’il fréquente. Mais il y greffe l’idée de mondes secrets, passés impénétrables des papillons ou vie antérieure des minéraux.

Multidisciplinaire,

Maurice Sand ne fut pas un précurseur, il n’appartenait à aucune école artistique, s’exprimait peu ou pas sur son art, fut lui-même un métissé à la fois parisien et provincial, absorbé par ses recherches et ses travaux, même par l’agriculture au terme de sa vie. La parenté entre ses pratiques et celles que valorise aujourd’hui la création n’en est pas moins remarquable. Ce qu’on qualifiait hier de dilettantisme est devenu la qualité la plus célébrée en art contemporain, on l’appelle transversalité et on invite chacun à produire spectacles et installations où fusionnent les modes d’expression les plus différents. Quant au mariage de la science et de la fantaisie, il s’est appuyé sur la science-fiction au début du 20ème siècle pour envahir désormais l’art de recherche et l’art populaire, du cinéma à la bande dessinée, du roman historique aux illusions visuelles numériques. Partout, le rire et le burlesque ont acquis non seulement droit de cité, et d’université, mais aussi leurs lettres de noblesse.

Lise Bissonnette

Maurice, l'homme

Jean François Maurice Arnaud Dudevant nait à Paris le 30 juin 1823. Il est le fils de Aurore Dupin, plus connu sous le pseudonyme de George Sand. 

 

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Le "Grand Théâtre" : le théâtre d'acteurs

Le « petit » théâtre de Maurice Sand est chez lui un mode constant de création. Il se sera rapproché du « grand » théâtre, mais sans s’y intégrer. Partenaire des exercices d’improvisation qui égayaient le Nohant des années 50, il a produit nombre de canevas, et dessiné avec maestria pendant plus de dix ans les costumes fantaisistes des acteurs.

 

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Les sciences, l'étude des métamorphoses

Sans appartenir à la communauté des chercheurs qui migrent des sociétés savantes aux universités dans la deuxième partie du 19ème siècle, Maurice Sand n’en est pas moins un naturaliste de niveau supérieur à celui des multiples autodidactes qui peuplaient la province française.

 

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L'Illustrateur parfois peintre

Maurice Sand avait l’œil et la sociabilité de l’artiste mais il a échappé aux us et canons de son siècle. Sa mère le voulait peintre, il en était d’accord et passa de 1839 à 1848 par l’atelier parisien d’Eugène Delacroix pour se former. Mais il ne maîtrisa jamais l’art du tableau. Sa vocation fut celle du dessin, métier subalterne à l’époque, qu’il pratiqua sous les formes les plus diverses et dont il fit le dénominateur commun de ses pratiques. Ses œuvres ne relèveront pas d’une quête esthétique particulière, elles s’inscrivent presque toujours dans une volonté d’accompagnement, il n’appartiendra à aucune école.

 

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Le théâtre de marionnettes

Le théâtre de marionnettes aura été sa scène de prédilection, objet d’une recherche continue et passionnée depuis les soirées d’acteurs sans spectateurs qui amusaient le manoir de Nohant en 1847. En manque de comédiens, Maurice et son ami Eugène Lambert avaient transformé des bûchettes en pantins, s’étaient pris au jeu. Dès l’hiver suivant, un petit théâtre trouvait forme avec ses décors propres, quelques effets spéciaux de couleurs et de lumières, et des textes convenant aux acteurs en effigie.

 

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Le Berry, partir et revenir

Maurice Sand était né à Paris, y avait fait des études au collège Henri IV, y avait reçu sa formation artistique, y avait vécu au sein de la grouillante faune artistique jusqu’à la fin de la trentaine. Son ancrage à Nohant était néanmoins réel. Outre son profond lien avec sa mère, son attrait pour les sciences naturelles et l’histoire y trouvaient un territoire de recherches. L’hommage le plus senti à ce pays fut en 1858 l’album des Légendes rustiques, approfondissement par le dessin d’un travail ethnologique mené auparavant avec George Sand. 

 

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Masques et Bouffons

Luxueux album d’art et travail de référence sur la Commedia dell’arte, l’ouvrage Masques et Bouffons demeure inclassable.

Même s’il s’agit du premier livre signé par Maurice Sand qui, à sa parution en 1859, ne se présente pas encore ni ne se perçoit comme écrivain, il a un rôle charnière puisqu’il annonce la diversité et la cohérence de toutes ses pratiques de création.

 

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L'écrivain des origines

Si l’on situe dans une catégorie à part l’album d’art et d’histoire que fut Masques et Bouffons, paru en 1859, c’est en 1862 qu’apparaît en librairie, pour la première fois, un récit signé Maurice Sand. Journal de son voyage en Amérique avec le Prince Jérôme Napoléon, le texte de Six mille lieues à toute vapeur a été préfacé par George Sand qui l’a lourdement révisé, politiquement censuré pour plaire au Prince son ami, et qui s’est ouverte de ses interventions à beaucoup de correspondants en laissant entendre que l’aventure serait sans lendemain.

 

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Maurice Sand et sa famille

A l'âge de 38 ans, Maurice se marie avec Marcelline Claudine Augustine Calamatta, une jeune fille âgée d'à peine 20 ans. Son père Luigi Calamatta, graveur, est un vieil ami de la famille Sand. Ce mariage est célébré le 26 juin 1862 à Nohant, dans la maison familiale. De cette union, naîtront trois enfants. Le 14 juillet 1863, Maurice est enfin père. 

 

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