Dans l’art, le thème de l’eau est abondamment traité au cours des siècles. Omniprésente dans l’univers, à la fois source de vie et d’énergie et symbole riche de significations, l’eau est mainte fois chantée par les poètes et les écrivains. Elle emplit de ses notes parfois suaves, parfois âcres les compositions des musiciens : Hendel avec « Water-Music » ou encore Frédéric Chopin avec « Prélude à la goutte d’eau » qu’il écrit à Majorque lors de son voyage avec George Sand…

L’eau joue de ses divers visages pour être tour à tour douce, salée, fraîche, jaillissante, stagnante, déchaînée, cristalline, sombre… Il est donc naturel que cet élément aux multiples facettes devienne une source d’inspiration inépuisable pour les artistes. Les représentations iconographiques se classent essentiellement en deux catégories. Tout d’abord, l’eau revêt une dimension allégorique : le fleuve, l’océan, la rivière, la source est personnifié sous les traits d’un homme ou d’une femme. Elle peut aussi devenir l’attribut d’un personnage ou d’une divinité. L’eau fait également l’objet d’une figuration naturelle qui se rapproche plus ou moins du réel. Si elle apparaît limpide et transparente, contenue dans un verre ou un pichet, au sein d’une nature morte, elle est surtout un élément essentiel du décor paysager. Située, dans un premier temps, en arrière plan d’une scène religieuse ou mythologique, l’eau sous la forme d’une mer, d’une cascade, d’un lac ou d’un cours d’eau se retrouve dans de nombreuses représentations du paysage rendu autonome. A la fin du XIXe siècle et surtout au XXe siècle, elle devient pour les artistes un véritable élément de la recherche esthétique.

Allégorie autour de l'eau

Connue dès l’antiquité, l’allégorie s’épanouit à la Renaissance. Elle est codifiée au XVIIe et XVIIIe siècle, période au cours de laquelle elle est particulièrement prisée en littérature et dans les arts. L’homme utilise l’allégorie afin de concéder une place plus importante à une valeur naturelle ou inanimée. Selon Raymond de Petity dans son « Manuel des artistes ou dictionnaire des emblèmes et allégories » (1770), l’allégorie apparaît comme « une manière poétique d’exprimer avec peu de figures et même parfois une seule, un grand sujet ». L’eau, élément naturel par excellence, à la fois, créateur et destructeur, avec ses nombreux sens, s’est vue, dans de nombreux récits mythologiques, doté d’un corps humain. Représentée à l’état naturel, dans un paysage ou sortant d’une urne, elle peut également être un attribut valorisant les qualités d’une personne, une vertu ou un thème comme celui de la sensualité, sous-jacent dans l’iconographie du bain.

La personnification est une formule couramment utilisée depuis l’antiquité. Elle consiste à attribuer des propriétés humaines à un animal ou un corps inanimé. Les éléments de la nature sont les premiers à avoir été personnifiés. Dans les représentations mythologiques gréco-romaines, l’océan, les fleuves ou les fontaines, lorsqu’ils évoquent la vie, la richesse ou le flot puissant sont dotés d’un corps humain. L’image allégorique la plus fréquente de la mer ou de l’océan est celle du Dieu Neptune-Poseïdon figuré barbu, nu, tenant son trident.

L’âge d’or de la personnification s’étend du XVIe au XVIIIe siècle. Suite à la traduction de l’ « Dictionnaire iconologique » de Cesare Ripa, la peinture allégorique devient le genre le plus élevé. Elle est réservée aux grands décors des palais et demeures princières. « Allégorie d’un fleuve », tableau exécuté par Pierre Caumette pour château de Saint-Germain-Beaupré, dans Creuse, reprend la tradition antique dans la représentation du fleuve, mais, cette fois-ci, sous les traits d’une figure féminine. Nonchalamment assise, son bras gauche s’appuie sur une urne renversée d’où s’écoule l’eau qui s’empresse de regagner le fleuve.

Au XIXe siècle, les personnifications demeurent. Avec « La Source » du sculpteur Laure Coutan-Montorgueil, la l’allégorie devient plus sensuelle et plus réaliste. Comme le célèbre tableau de Gustave Courbet conservé au musée d’Orsay, reprenant le même intitulé, cette représentation fait fi de l'académisme allégorique habituellement réservé au sujet. La jeune femme étant dépourvue d’attribut, le thème devient alors un prétexte pour représenter le corps féminin dénudé.

Le thème du bain a eu, au cours des siècles, une fortune iconographique abondante et diversifiée mettant en valeur les usages, les rites, l’hygiène, la santé ou encore le plaisir et l’érotisme. Ces différentes facettes du bain ont particulièrement intéressé les chercheurs. La mythologie regorge d’histoires présentant les bains des dieux et des héros. Celui de Diane est particulièrement prisé à la Renaissance. Actéon, un jeune chasseur qui se parcourait la forêt, surprit Diane et ses compagnes dans l’intimité de leur bain. Pour le punir, la déesse transforme Actéon en cerf qui est alors dévoré par ses chiens.

L’Ancien Testament, est également pourvu de nombreux épisodes de baignade liés à l’hygiène de la femme devenant alors un symbole d’érotisme. C’est lors du bain de Bethsabée que le roi David tombe amoureux de la jeune femme. Dans le cas de la chaste Suzanne, celle-ci est surprise au cours de sa toilette par deux vieillards qui souhaitent ardemment la soumettre à leur désir, ce qu’elle refuse. Si Suzanne est pour l’Eglise, le symbole de l’âme sauvée, le peintre fait encore une fois la part belle au nu féminin source de toute tentation.

Le XVIIIe siècle va apporter aux thèmes liés au bain davantage de sensualité et légèreté. Les baigneuses deviennent un sujet en soi sans qu’il n’y ai plus besoin de prétexte mythologique.

L’eau, transparente et liquide s’écoulant d’un vase devient un attribut permettant la construction d’une allégorie, idée abstraite ou un concept moral difficile à représenter directement. L’iconographie de Cesare Ripa traduit en Français par Jean Baudoin en 1636, était au XVIIe siècle, un véritable manuel codifié guidant les artistes dans leur création. Ainsi, l’allégorie de la Patience doit être représentée par une femme au pied d’un écueil distillant des gouttes d’eau qui tombent sur des chaînes qui lui lient les mains. La Grammaire est également une femme tenant de la main droite un vase contenant de l’eau avec laquelle elle arrose une plante.

Toujours dans le même ouvrage, la chasteté est figurée sous les traits d’une belle femme portant une robe blanche tenant dans une main un crible qui retient l’eau. Ainsi, la vestale Tuccia est représentée avec l’eau qu’elle porta dans un crible depuis le Tibre jusqu'au temple de la déesse et qui lui servit à prouver sa chasteté injustement mise en cause comme le raconte Valère Maxime dans "Actions et paroles mémorables" : ( livre VIII, chapitre 1 à 5 ). « Un secours semblable sauva la jeune Vestale Tuccia qui était accusée d'inceste […] Forte du sentiment de sa pureté, elle osa chercher son salut par un moyen risqué. Elle saisit un crible et s'adressant à Vesta : "Si j'ai toujours approché de tes autels avec des mains pures, accorde-moi de prendre dans ce crible de l'eau du Tibre et de la porter jusque dans ton temple." Quelque hardi et téméraire que fût un pareil vœu, la nature obéit d'elle-même au désir de la prêtresse. »

L'eau dans le paysage

Si de nombreux artistes ont illustré les aspects symboliques et allégoriques de l’eau, d’autres au contraire se sont intéressés à l’élément dans son contexte naturel. Depuis l’antiquité, le paysage sert de cadre à des vues illusionnistes où se déroulent des scènes mythologiques, puis des épisodes religieux. Dans un premier temps, le paysage et ses composantes servent donc à situer l’unité de lieu de l’œuvre et contribuent à créer une atmosphère.

Peu à peu dans les scènes narratives, on accorde de plus en plus d’importance à la figuration de la nature. Dans le tableau de Hubert Robert «Cascade sous un pont en ruine » et de Louis Gadebois « Bord de rivière », le paysage prenant tout son ampleur est animé de petits personnages dont la représentation n’est qu’anecdotique.

A partir du XVIe siècle, le paysage prend son autonomie et devient un genre en soi. Le peintre le compose alors en atelier à partir d’éléments saisis sur le vif dans ses carnets de croquis. L’eau est un sujet très important dans l’agencement du paysage au même titre que la végétation, les montagnes, les chemins… elle peut être déclinée suivant une infinité de variétés : une source, une cascade, une rivière, un lac, une mer, une mare… Elle introduit alors une certaine stabilité ou au contraire un déséquilibre dans la composition. Transparente ou opaque, elle joue avec la lumière qu’elle reflète comme elle le fait également avec les autres éléments du paysage et notamment le ciel. Du ruisseau à la cascade, le peintre reprend toujours son mouvement plus ou moins vif. Malgré tout, il ne néglige pas l’eau calme, voir même gelée des montagnes ou des paysages enneigés. Toutes ces composantes introduisent esthétiquement un équilibre coloré et anime la représentation.

Les artistes nordiques s’intéressent à l’expérience du quotidien partagé par tous les hommes. Le réalisme est la composante principale de cette peinture exécutée souvent par de petits maîtres peu connus, bons praticiens et très productifs. Afin de satisfaire leur clientèle, ils se spécialisent dans un thème particulier : les vues de fleuves, les marines, les paysages enneigés…

Dans le paysage hollandais, l'ouverture sur le ciel, le jeu sur la monochromie mais surtout la simplicité de la composition basée sur une absence revendiquée de réel sujet (il ne s'agit plus d'un épisode biblique, historique ou mythologique) marquent la naissance d'un nouveau genre de paysages proprement hollandais. Le véritable sujet de l’œuvre est désormais cette poésie émanant d'une atmosphère lumineuse, mêlant avec douceur l'eau et le ciel.

Les scènes hivernales deviennent un genre à part entière particulièrement prisé par les collectionneurs. Représentant des paysages souvent enneigés, elles ont été décrites comme des témoignages quelque peu idyllique du climat froid du « Petit Âge Glaciaire » qui sévit au XVIIe siècle. Une large part de ces peintures figure des patineurs évoluant joyeusement sur des rivières ou canaux gelés ainsi que de nombreux personnages s’adonnant aux activités de la saison froide.

Les marines, peintures ayant la mer pour sujet, apparaissent à proprement parler pour la première fois aux Pays-Bas à partir XVIe siècle. Cependant, c’est véritablement au milieu du XVIIe siècle que les peintres hollandais, conscients de l’importance de leur flotte nationale et du rôle majeur joué par la mer dans leur économie, font des marines une spécialité. Les peintres apportent ainsi leur contribution à cette célébration de la République triomphante. Si certaines représentations restent fidèles à la précision documentaire, d’autres comme la « Marine avec statue » exécutée par Verschuire célèbre d’un éclat mélancolique cette Odyssée hollandaise.

Dès la du XVIIIe siècle, décidés à rompre avec la tradition paysagère héritée du classicisme, les artistes cherchent à traduire les dimensions exaltantes et contemporaines du paysage afin de renouveler le genre. Au XVIe siècle, déjà, certains peintres tels que Jan Brueghel expérimentent le thème du naufrage dans des compositions particulièrement visionnaires où le ciel et l'eau semblent se mélanger au grand désarrois du genre humain réduit à de petits personnages emportés dans la tempête.

A la grandeur monumentale et paisible du paysage classique, s’oppose désormais la violence du sentiment, la démesure de la passion et le sublime du paysage romantique. Né de l’inconscient et des rêves, le paysage romantique est dramatique et souvent hostile : le ciel orageux empli de nuages obscurs, l’océan démonté déferle par vagues terrifiantes sur la côte escarpée et dangereuse. L’homme paraît alors minuscule, perdu dans cette immensité de la nature démesurée et déchaînée.

Dans ce contexte, le thème du déluge devient à la mode. La sensibilité de l’époque attirée par les catastrophes naturelles, y trouve un nouvel objet de fascination. Dans la « Scène de déluge » peinte par Girodet, l’artiste privilégie un plan rapproché sur un petit groupe de personnages où se concentre l’horreur du drame, toute possibilité de rédemption étant exclue. Il y a ici un rejet de toute allusion biblique.

Dans le contexte du romantisme, de nombreux artistes entreprennent des périples lointains à la découverte du monde et des ces cultures. Auguste Borget (1808 – 1877) est l’un des ces artistes voyageurs qui ont rapporté de leurs expéditions de nombreux dessins et aquarelles. Il parcourt l’Amérique du nord et du sud, l’extrême orient et les Indes, pendant quatre ans.

Le motif du fleuve ou de la rivière reste très fréquent dans l’œuvre de Borget. Il compose souvent ces représentations en plaçant un cours d’eau paisible et sage au premier plan, devant un palais, un moulin, une architecture, un quartier populaire. Un tel procédé lui permet d’équilibrer sa composition et de lui donner une certaine profondeur. Si sa vision reste résolument réaliste et plus sobre que celle de ses contemporains orientalistes, l’eau introduit une légère nuance à la fois apaisante et mélancolique.

Dans la deuxième moitié du XIXe siècle, les progrès techniques facilitent la mobilité du peintre et le travail hors de l’atelier. La monté du régionalisme et l’industrialisation jouent également un rôle non négligeable dans les voyages que peuvent effectuer, à travers la campagne française, les artistes comme ceux de Barbizon, de Pont Aven et les impressionnistes …

Le paysagiste Emmanuel Lansyer ( 1835-1893 ), formé dans l’atelier d’Eugène Viollet-Le-Duc et de Gustave Courbet est un peintre inclassable. Il se lie d’amitié avec le poète Josée Maria de Hérédia et fréquente les membres de l’école de Barbizon. Il exécute environ 1500 toiles lors de ses voyages en France : en Bretagne où il aime particulièrement séjourner, en Normandie, en Vendée et bien sûr en région Centre à Loches où il possède une maison. Si le thème de l’eau n’a pas exclusivement l’intérêt du peintre, celui-ci reste très présent dans son œuvre sous les formes les plus diverses : paysages côtiers, pleine mer, ruisseaux, cascades, lavoirs, fontaines, marais salants… Dans chacune de ses peintures l’eau prend une dimension différente, elle peut être source de vie et d’énergie, lieu de sociabilité, de travail et de plaisir. Dans certaines vues de plages à marée basse où le ciel gris se reflète dans les flaques laissées par la mer retirée, l’eau devient source d’expérimentation visuelle. Le peintre construit alors son tableau en deux bandes horizontales presque abstraites que seuls les rochers et quelques silhouettes humaines viennent contrarier. Dans « La Vague », l'artiste donne une vision intense de la mer écumante, orageuse et tourmentée, traduisant la puissance sauvage des forces naturelles qui fascine l’artiste.

L'eau comme source d'expérimentation visuelle

L’eau a également été pour les artistes le sujet d’expérimentations visuelles extrêmement diverses. L’intérêt des peintres comme Turner, Monet ou Vlaminick ne se porte plus exclusivement sur le paysage dans son ensemble, mais davantage sur l’élément « eau » et sur ses diverses possibilités de rendre les effets atmosphériques, les reflets ondulants et incomplets ainsi que les jeux de lumière.

A partir du XXe siècle, l’eau devient un élément plastique permettant de travailler la fluidité, la transparence et l’immatérialité, dans la peinture, mais également dans la sculpture, la photographie et les installations. L’eau est représentée, mais également utilisée, elle-même, comme dans la fontaine Stravinsky à Beaubourg, réalisée par Jean Tinguely et Niki de Saint-Phalle. Elle participe à l’animation visuelle et sonore de l’œuvre. Il existe autant de regards sur l’eau qu'il y a d’artistes traitant le sujet. Le Peintre Jacques Monory (né en 1924) introduit dans son tableau le motif iconographique de la piscine, directement issu de la société contemporaine qu’il situe au premier plan de sa composition. L’eau y est paisible presque stagnante alors que, tout autour, l’architecture et les objets semblent être pris dans une tempête détruisant tout sur son passage. Dans les œuvres de Jean Trousselle la notion de réflexion reste essentielle puisque ses peintures sont composées du paysage et de sa réverbération exacte. L’eau calme de l’étang ou de la rivière semble alors se dématérialiser laissant la part belle à cette double vision. Maurice Buffet (1909-2000) artiste surréaliste est né en Vendée où le contact avec la mer le marque définitivement. Il introduit fréquemment le motif de l’eau dans ses visions oniriques et symboliques.

Éleve de la Royal Academy en 1789, Joseph Mallord William Turner (1775 – 1851) commença sa carrière en vendant ses gravures et en dessinant des vues topographiques. Insatiable voyageur, le peintre effectue, en 1826, un long périple en France, remontant la Loire de Nantes à Orléans et exécutant une abondante série de croquis et d’aquarelles de plus de quarante villes et sites comme Beaugency, ensuite diffusées par la gravure. Vingt et une de ces vues figureront dans la première édition du "Tour Annuel de Turner" en 1831.

 Turner est un peintre de l’eau qu’il représente quasiment dans chaque toile. Il étudie avec précision les effets atmosphériques, affectionne particulièrement les tempêtes en mer et les brouillards. Il reste toute sa vie un peintre indépendant, particulièrement novateur dans ses représentations de paysage qui frôlent parfois l’abstraction. Les flots se confondent avec le ciel et les repères narratifs sont réduits à leur plus simple expression. La couleur lui permet à repousser les limites traditionnelles de la vision pure et du sublime. Les artistes du XXe siècle ont vu en lui un précurseur de l’art abstrait.

Le terme « impressionnisme » est né, en 1874, dans article sarcastique du critique Louis Leroy publié par la revue « Le Charivari », dans lequel il tourne en dérision le tableau de Claude Monet (1840 – 1926) intitulé « Impression soleil levant ». Les peintres impressionnistes choisissent leurs sujets dans les paysages et parmi les scènes de la vie contemporaine. Travaillant « sur le motif », ils poussent très loin l'étude du plein air et font de la lumière et de l’eau les éléments essentiels et mouvants de leur peinture, écartant les couleurs sombres pour utiliser des tonalités pures réparties en touches divisées.

Monet devient rapidement le chef de file de ce groupe, opposé à l’académisme, qui se propose de saisir l’instant éphémère. Il est le peintre des eaux calmes. Dans de nombreux tableaux comme les « Nymphéas », l’eau envahit tout l’espace et le peintre s’attache à représenter les subtils jeux de lumière qu’offrent les reflets de la végétation. Pour la réalisation de son tableau « Un bras de Seine près de Vetheuil », le peintre se déplace dans son bateau- atelier. Gustave Geffroy (historien et critique d’art) note que Monet réussit « à analyser la couleur toujours changeante, toujours mouvantes de l’eau qui court dans les rivières[…], il montre cette couleur faite de l’état du fond, de l’état du ciel et des reflets des objets. »

Dans la lignée de l’impressionnisme, s’ouvre entre 1883 et 1903, autour du poète Maurice Rollinat, la période la plus créative de l’histoire des peintres de la Vallée de la Creuse. L’école de Crozant dont le nom vient du village éponyme, situé à la limite nord du département de la Creuse, regroupe une pléiade de peintres paysagistes qui travaillent sur les rives des deux Creuses, de la Sédelle et de la Gargilesse. Monet attiré par la renommée du lieu y effectua un court séjour de mars à mai 1889 et réalisa une série de 23 toiles sur le confluent des deux Creuses. Cependant, il revient à un autre impressionniste de faire le lien entre les nouvelles aspirations de toute une génération d’artistes et la vallée de la Creuse : Armand Guillaumin (1840 – 1927). Clémentine Ballot, Paul Madeline, Léon Detroy, Fernand Maillaud lui étaient très liés et adoptent ses motifs et ses coloris somptueux… L’atmosphère, la lumière, les couleurs des saisons et l’eau qui façonne la campagne traduisent bien les recherches plastiques de ces peintres que sont l’impression et l’émotion devant un paysage.

Le fauvisme est caractérisé par l'audace et la nouveauté de ses recherches chromatiques. Les peintres séparaient la couleur de sa référence à l'objet afin d'accentuer l'expression et réagissaient de manière provocatrice contre les sensations visuelles et la douceur de l'impressionnisme. Maurice de Vlaminck (1876-1958) qui est l’un des précurseurs du mouvement, s’intéresse moins recherches de composition qu’aux qualités spatiales et affectives de la couleur. La toile représentant « La Baie des Trépassés » est caractérisée par des tonalités sombres et plombées, très mélangées que le peintre conservera jusqu’à sa mort. L’emploi soutenu du noir et des blancs donne à son paysage une tonalité presque romantique, dominé par le ciel d’orage et secoué par la tempête, un aspect dramatique et violent.