De l’importance de Quantin dans l’histoire de l’Imagerie Pellerin
L’ « Imagerie artistique » de Quantin, au-delà de son intérêt propre, revêt une importance majeure dans l’histoire de l’Imagerie Pellerin : sa modernité a suscité l’émulation dans les rangs de la vieille imagerie et a, de façon indirecte, permis l’éclosion d’un nouveau genre à Épinal.
Georges Pellerin, à la tête de la célèbre et florissante imagerie d’Épinal avec Pol Payonne, voit en Quantin un sérieux concurrent : voilà un éditeur enfantin qui s’entoure des meilleurs dessinateurs (Steinlen, Caran d’Ache…) – beaucoup sont issus de la presse parisienne – et qui renouvelle le genre de l’imagerie pour enfant non seulement dans les sujets, dans le ton, mais aussi dans les techniques. La réaction ne se fait pas attendre : en 1889, soit trois ans après le lancement de l’ « Imagerie artistique », Pellerin lance sa « Série aux Armes d’Épinal ». Au sein de cette collection, le sous-groupe intitulé « Histoires et scènes humoristiques, contes moraux et merveilleux », est le plus important. Les planches y sont les plus nombreuses – près de 500 en 1916 – et c’est dans ce groupe que la révolution est la plus forte : des artistes parisiens à la mode ou émergents sont sollicités. Les sujets et les compositions sont modernes : derrière l’impératif moral, encore présent, humour et divertissement envahissent les planches. Si Pellerin n’adopte pas la chromotypographie et conserve la technique du pochoir, l’utilisation d’aquatypes à sept ou neuf couleurs permet toutefois une belle superposition de teintes. Enfin, les cases rigides et sages plient sous le poids de la modernité : elles s’ornementent, se tordent, s’allongent, s’adaptent aux besoins du récit, voire disparaissent. Surtout, elles poussent parfois encore plus loin le principe de la narration séquentielle amorcé par Quantin ; principe qui annonce, en grande partie, la bande dessinée à venir… À ce titre, l’ « Imagerie artistique » et, à sa suite la « Série aux Armes d’Épinal », amorcent un tournant majeur.