987.5.1

La grande Résurrection de Lazare

17e siècle (2e quart) 1632

Eau forte et burin sur papier vergé. Filigrane

Hauteur en cm : 36,7 Largeur en cm : 25,6

Après avoir fait ouvrier le tombeau où gît Lazare depuis quatre jours, Jésus, débout sur la pierre qui recouvrait le sépulcre, ramène le défunt à la vie, en suscitant une très vive émotion parmi les témoins de la scène de la scène. "Cela dit, il (Jésus) cria : "Lazare, viens ici, Dehors !". Le mort sortit, les pieds et les mains liés de bandelettes et le visage enveloppé d'un suaire". (Jean XI-43-44). Rembrandt exécuta probablement cette estampe en 1632, la même année que sa célèbre Leçon d'anatomie du Professeur Tulp (1). Les grandes dimensions de la feuille, le cadre gravé, la forme cintrée de la partie supérieure, la composition animée et l'atmosphère dramatique de cette planche, témoignent de la volonté de l'artiste à rivaliser avec la peinture en grisaille. Comparativement aux épreuves de premiers états, l'épreuve du musée de Tourcoing, du huitième état sur dix, comporte de nombreuses modifications, lesquelles concernent essentiellement les figures du groupe de droite. Des retouches au burin ont également été pratiquées dans les ombres pour intensifier les contrastes. La composition très théâtrale met en valeur la figure puissante du Christ, qui s'oppose, par sa position statique et sa verticalité, à la faiblesse du ressuscité, allongé à ses pieds sur un axe quasi horizontal. Par des indications concises, Rembrandt a parfaitement réussi à traduire, l'émotion de la foule, avec une justesse et une variété d'expression extraordinaires. Sa pointe s'est faite encore plus synthétique pour exprimer d'un trait palpitant la vie qui s'insuffle dans le corps engourdi de Lazare. En revanche, l'imposante figure du Christ a bénéficié de tailles profondes et régulières, notamment pour le traitement du drapé. Toutefois, dans cette planche, le moyen d'expression privilégié de l'artiste demeure l'utilisation du clair obscur. La luminosité qui envahit le centre de la composition, se dilue avec fluidité et s'oppose, sans heurts, à l'ombre de la partie gauche. Cette lutte entre l'ombre et la lumière est aussi pour Rembrandt, celle de la vie et de la mort, qui échappe aux mortels, et que seul le Christ, qui tourne le dos aux ténèbres, peut arbitrer. Le clair obscur sert donc ici à magnifier la puissance du Messie, en enveloppant la scène d'une aura surnaturelle. En 1630, Rembrandt avait déjà peint une Résurrection de Lazare (2) et réalisé un dessin à la sanguine qui a dû servir de modèle à cette planche (3). Dix ans plus tard, l'artiste reprit le même sujet, cette fois à l'eau forte pure, avec la petite Résurrection de Lazare, traitée de manière plus dépouillée, dans un esprit très différent. Cette estampe reste l'une des interprétations les plus remarquables de ce thème biblique, à travers les temps. Son succès lui a valu d'être copiée à maintes reprises, notamment par Van Gogh qui a tâché d'atteindre par la couleur poussée à son paroxysme, la même intensité spirituelle (4). S.R. (1) Huile sur toile, H. 169,5 ; L. 216,6, La Haye, Mauritshuys. (2) Huile sur toile, H. 935 ; L. 810, Los Angeles, County Museum of Art. (3) Sanguine avec rehauts de blanc, H. 280 ; L. 203, Londres, British Museum. (4) Huile sur toile, H. 485 ; L. 630, Amsterdam, Rijksmuseum Vincent Van Gogh.

Association pour la promotion du musée des Beaux-arts de Tourcoing en 1987 (Achat avec le FRAM)

S. au centre : "RHL Van Ryn f.".

Invention Interprétation Reproduction cat. 10 p. 41, reprod. noir et blanc p. 40 GERSAINT Edmé-François, catalogue raisonné de n° 74 BARTSCH Adam, catalogue raisonné de toutes les n° 73 BLANC Charles, L'oeuvre complet de Rembrandt, 1859, n° 48 DUTUIT Eugène, Manuel de l'amateur d'Estampes. 1883, n° 79 HIND Arthur M., Rembrandt's Etchings, Londres, n° 96 MUNZ Ludwig, Rembrandt's Etchings, Londres, 1952 n° 192 BIORKLUND George and BARNARD Osbert H., n° 32-4 WHITE Christopher, Rembrandt as an Etcher pp. 29 et suivantes WHITE Christopher and BOON K. G. n° 73 FILEDT KOK J.P., Rembrant's Etchings and drawings n° 73 GURATSCH Herwig, Die Auferweckung des Lazarus in 1980, vol. II, pp. 151 à 167 HARVEY C.M., Form and Content in Rembrandt's early 1983 (non consulté) ALLEMAND Evelyne-Dorothée, Dix ans d'acquisition p. 265, reprod. coul. p. 265