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Avant-Après : Les oeuvres restaurées par le C2RMF

Pas moins de vingt-trois tableaux ont pu être restaurés au C2RMF (Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France) pour les différents lieux de l’exposition « Heures italiennes » : toutes les périodes étaient représentées, des primitifs au XVIIIe siècle, en passant par les artistes de la Renaissance vénitienne et les Caravagesques.

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◄ Anonyme français d’après Caravage et Louis Finson, Madeleine pénitente, 1e moitié du XVIIe siècle. huile sur toile. Senlis, musée d’art et d’archéologie. H. 1,23 ; L. 1,01 m (Montage et superposition de l'Avant restauration lumière rasante ©C2RMF/Laurence Clivet – en cours de réintégration ©C2RMF/Thomas Clot)

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► Le Christ en croix au musée Boucher-de-Perthes d’Abbeville

Anonyme des Abruzzes, Le Christ en croix, vers 1420-1440. Tempéra sur panneau de peuplier. H.0, 35 m ; L. 0,26 m. Abbeville, musée Boucher-de-Perthes. (Avant restauration ©C2RMF/Gérard de Puniet- Après restauration ©C2RMF/Thomas Clot)

Trois tableaux du musée Boucher-de-Perthes ont été restaurés au C2RMF pour Heures italiennes sous la conduite de sa directrice Agathe Jagerschmidt.

Le Christ en croix présentait des soulèvements car des baguettes à contrefil, destinées à masquer le jour dans la vue du cadre du XIXe siècle, empêchaient le libre jeu du bois. La radiographie a révélé que le panneau était cassé en deux et mastiqué sur toute sa hauteur. Jonathan Graindorge-Lamour a engagé une importante restauration du support : il a retiré les baguettes contraignantes et le doublage en châtaignier masquant la cassure, pour installer le panneau sur un berceau à ressorts puis dans un soclage en acier teinté de sa conception.

Rosaria Motta a pratiqué un nettoyage approfondi de la couche picturale chargée de repeints débordants. Elle a mis en valeur l’original, en particulier le manteau de la Vierge, le fond d’or et les poinçons. Sa grande connaissance des Primitifs italiens rend la matière originale du tableau plus lisible : l’or usé laisse voir le bol rouge, le manteau jaune de Saint Jean, sans doute teinté de laques, est décoloré. Le manteau bleu de la Vierge était monté à l’aide d’une sous-couche verte visible en bas à gauche. La principale difficulté a résidé dans la réintégration des lacunes le long de la cassure. Un ton de fond de type acqua sporca a évité d’inventer des mouvements pour les plis du manteau, car ceux-ci semblent caractéristiques de ce peintre, à en juger par le superbe dessin sous-jacent enroulé perceptible à l’œil nu et a fortiori aux infrarouges.

Stéphanie Deprouw-Augustin

► Deux tableaux de Carlo Labruzzi au Palais impérial de Compiègne

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Carlo LABRUZZI (1748-1817), Le Repos de la Sainte Famille, 1776. Huiles sur toile. Compiègne, musée national du château, dépôts du musée du Louvre. H. 0,86 ; L. 0,598 m (avant restauration en lumière rasante ©C2RMF/Gérald Parisse – avec tests de nettoyage ©C2RMF/Thomas Clot)


Carlo LABRUZZI (1748-1817), Le Repos de la Sainte Famille, 1776 & Télémaque et Minerve, vers 1775-1780. Huiles sur toile. Compiègne, musée national du château, dépôts du musée du Louvre. H. 0,86 ; L. 0,598 m  (avant restauration en lumière directe ©C2RMF/Gérald Parisse – après nettoyage ©C2RMF/Thomas Clot)

Conservées depuis longtemps en réserve, ces deux tableaux étaient dans un état de conservation assez mauvais : ils avaient en commun un vernis très jauni et un fort encrassement qui altéraient profondément le coloris raffiné de ces paysages. Par ailleurs, le premier présentait une importante déchirure et lacune de toile dans le paysage, et un vandalisme sur les yeux de la Vierge, tandis que la toile du second était très oxydée, et que des repeints débordants avaient été posés sur ses craquelures prématurées.

Après le décrassage, un niveau de nettoyage cohérent du vernis a été proposé par Carole Clairon-Labarthe et Claire de Fleurieu pour garder la cohérence de ces deux toiles qui ont peut-être été conçues en pendant : ce niveau a été assez poussé pour pouvoir atteindre la couche des repeints mentionnés dans le second tableau et les retirer. Par ailleurs, les deux toiles ont été renforcées par un doublage, tandis que le châssis qui était original a été conservé mais équipé d’un chanfrein afin de minimiser les risques de cassures de la toile et de la couche picturale.

Enfin, la réintégration choisie a été de type illusionniste pour ces deux tableaux peints de manière raffinée : la lacune dans les feuillages était importante, mais ce sont les yeux de la Vierge qui ont posé un véritable problème de reconstitution : à partir du moment où il était décidé de les reconstituer, quelle expression leur donner ? Au vu de l’iconographie de l’oeuvre, où l’Enfant Jésus fait signe à son père de ne pas faire de bruit, il a été choisi de favoriser une expression rêveuse, les yeux baissés, pour laquelle on pouvait s’inspirer du visage de Minerve dans l’autre tableau. Les différentes décisions concernant ces restaurations ont toutes fait l’objet de discussions et ont été validées par les responsables scientifiques de l’oeuvre, Juliette Rémy et Hélène Meyer, conservatrices à Compiègne, ainsi que Stéphane Loire, conservateur au musée du Louvre.

 Matthieu Gilles

► Palma le jeune, Le Baptême du Christ à l’abbaye royale de Fontaine-Chaalis


Palma le jeune, Le Baptême du Christ, entre 1548 – 1628. Huile sur toile. Fontaine-Chaalis, abbaye royale. (Avant restauration : réflectographie dans l’infrarouge ©C2RMF/Jean-Louis Bellec – Ensemble en cours de réintégration ©C2RMF/Thomas Clot)

Avant intervention ce grand tableau d’église était peu lisible. La couche picturale était couverte d’un vernis brun épais, encrassé en profondeur dans les creux et très oxydé. Elle  présentait également des zones de chanci, des coulures verticales de cire et de nombreuses lacunes.

L’imagerie scientifique a mis en évidence deux campagnes de restauration de la couche picturale, dont une fondamentale probablement effectuée au XIXe siècle à la suite du rentoilage. Celui-ci avait pour but le renforcement de la toile et la pose d’incrustations sur les deux zones de brûlures de cierge.

Après un long travail d’enlèvement du vernis brun épais suivi de la reprise des incrustations, un large repeint brun foncé, d’une consistance différente de la couche picturale originale subsistait en bas. Les sondages réalisés ont fait état d’un vert lumineux sous ce repeint, la réflectographie dans l’infrarouge  a mis en évidence les plis bien modulés d’un manteau.  Il fut donc décidé d’enlever ce repeint en raison de sa faible qualité esthétique mais surtout parce qu’il contrariait l’iconographie originale . En effet, sans exclure l’hypothèse d’un changement de goût, on peut aussi penser que ce repeint est dû à une incompréhension du double manteau du Baptiste, souvent représenté avec une seule peau de bête. Le second manteau faisant référence au prophète Élie, préfiguration du saint, n’a plus été compris à partir d’une certaine époque, d’où son masquage.

La restauration a permis de retrouver une œuvre de qualité picturale  incontestable, dont il était devenu impossible de juger de la qualité.

Clarisse Delmas

► Madeleine pénitente d’après Caravage au musée d’art et d’archéologie de Senlis


Anonyme français d’après Caravage et Louis Finson, Madeleine pénitente, 1e moitié du XVIIe siècle. huile sur toile. Senlis, musée d’art et d’archéologie. H. 1,23 ; L. 1,01 m (Avant restauration lumière rasante ©C2RMF/Laurence Clivet – en cours de réintégration ©C2RMF/Thomas Clot)

Redécouverte en réserve, la toile était dans un état très dégradé. Le cliché en lumière rasante fait à l’arrivée au C2RMF illustre son état de surface irrégulier. À l’évidence, ce tableau avait stagné dans l’eau en partie inférieure. Une baguette d’encadrement était clouée à la face. Jean-Pascal Viala a démonté l’ancien rentoilage, retiré les pièces et papiers de renfort, repris les déchirures, consolidé les bords déchiquetés et rentoilé à nouveau le tableau avec une technique légère utilisant la colle d’esturgeon.

À la face, Yolanta Mendili s’est attachée à rendre lisible la composition, couverte de vernis oxydés et chancis et de repeints très débordants. La clôture en plessis à l’arrière-plan ne se voyait plus. Un patient travail de repiquage a permis de mettre en valeur les carnations usées au niveau de la sous-couche de terre verte et de magnifiques morceaux tels la larme que laisse couler la sainte. Jean-Pierre Galopin a conçu un cadre doré dont l’éclat donne une profondeur au clair-obscur mystique mis en scène au fond de la grotte.
La restauration s’est faite sous la conduite de Marie-Bénédicte Astier-Dumarteau et Luc Camino, responsables des collections à Senlis, qui travaillent régulièrement en collaboration avec les filières peinture et sculpture du Département Restauration du C2RMF.

Stéphanie Deprouw-Augustin

 

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