Livre de dévotion destiné aux laïcs, le livre d’heures est apparu sous sa forme primitive au 13e siècle. Supplantant le psautier auprès des fidèles dans leur récitation quotidienne des prières, il connaît son apogée deux siècles plus tard et est traditionnellement présenté comme le best seller du Moyen Âge. Le cœur du livre est composé des heures de la Vierge qui donnent son nom à l’ouvrage, les prières étant distribuées tout au long des heures canoniales.

  La grande majorité des prières sont copiées en latin et peu d’entre elles connaissent une diffusion en langue française. Le succès commercial des livres d’heures révèle l’importance de la prière et de la lecture individuelle à la fin du Moyen Âge. Ces ouvrages sont la propriété d’une large couche de la population, des grands princes aux bourgeois, et le bien personnel de nombreuses femmes. Souvent premier ou seul livre possédé, c'est un objet de luxe richement enluminé. Il en résulte une grande variété de compositions, à la fois textuelles et picturales, chaque commanditaire faisant réaliser son manuscrit suivant ses désirs et ses moyens financiers. Un portrait, une devise ou des armoiries parfois associés à la représentation d’un saint patron peuvent le personnaliser. À la fin du Moyen Âge, tandis que les meilleurs peintres renouvellent l'iconographie de ces livres, les libraires proposent des livres d’heures d’étal pouvant être enrichis, à la demande, par l’insertion d’enluminures et de prières répondant à une dévotion particulière ou à une volonté de magnifier le volume.Livre de dévotion destiné aux laïcs, le livre d’heures est apparu sous sa forme primitive au 13e siècle. Supplantant le psautier auprès des fidèles dans leur récitation quotidienne des prières, il connaît son apogée deux siècles plus tard et est traditionnellement présenté comme le best seller du Moyen Âge. Le cœur du livre est composé des heures de la Vierge qui donnent son nom à l’ouvrage, les prières étant distribuées tout au long des heures canoniales.

Livre d'heures d'Anne de Mathefelon, 1415-1420, Musée de Bourges

  La destinataire de ce manuscrit inachevé est révélée par son nom de jeune fille, écrit en toutes lettres dans les marges du folio 27 entourant la scène de l'annonciation : Anne de Mathefelon. Des documents conservés aux archives départementales de Brest permettent de l'identifier comme une dame issue de la noblesse de Vitré, mariée le 10 mars 1416 avec Guillaume de Sévigné. Les écus présents sur le folio (identifiés par Jean-Luc Deuffic sur son blog Pecia) aux armes des Mathefelon et des Sévigné, prennent la forme losangée qui peut signifier le veuvage d'Anne après 1423.

  Le manuscrit renferme des Heures à l'usage de la Vierge à l'usage de Rennes. Le calendrier témoigne d'une origine parisienne sur laquelle se superpose le propre d'un calendrier breton, avec deux jours dédiés à saint Yves et la mention des saints évêques des diocèses bretons, de sainte Anne et des moines bretons et abbés d'Angleterre, d'Ecosse ou d'Irlande.

  L'ensemble des vingt-quatre miniatures du manuscrit sont à rapprocher du travail du maître de Luçon qui a travaillé notamment pour Jean de Berry (missel-pontifical, BNF, Paris, lat. 8886 et Térence des Ducs, BNF, Arsenal, ms. 664, voir liens ci-dessous). Son style s'orient vers toujours plus de simplicité, de délicatesse et de pureté des formes, dans des coloris d'une grande fraicheur et d'une réelle sensibilité lyrique. Sans être novateur, le Maître de Luçon amène à sa perfection le style du gothique international.

Valérie Biquet

Diplômée d'un Master 2 Recherche

Ecole des hautes études en sciences sociales, Paris

Livre d'heures, atelier Jean de Bourdichon

  Cette représentation de Job, contrecollée sur bois et recouverte d'un épais verni, lui conférant l'aspect d'un petit tableau de dévotion, est une miniature découpée dans un livre d'heures, certainement issu de l'atelier de Jean Bourdichon. Assis sur un tas de fumier, Job mis à l’épreuve par Satan et atteint de la lèpre endure les moqueries de ses amis, sans renier Dieu. Le thème de Job raillé par ses amis, peu courant dans la peinture de chevalet, est fréquent dans les livres d’heures de la fin du XVe siècle et notamment dans l’œuvre de Jean Bourdichon qui a traité ce thème au moins une quinzaine de fois.

   Par son format réduit et son cadrage resserré, cette miniature possède une force dramatique caractéristique des œuvres tardives du maître et de son entourage. Il est à noter qu'une Annonciation peinte sur un folio découpé conservé au Metropolitan Muséum of Art (inv. 2004.56, voir le lien ci-dessous), proche du Job de Blois par ses dimensions, son exécution, le cadre formé d'un filet doré et l'écriture au verso, pourrait provenir du même livre d'heures.

Pierre-Gilles Girault

Conservateur et directeur adjoint, château royal et musées de Blois

Livre d'heures, entourage de Jean Pichore, Romorantin

  Ce livre d’heures à l’usage de Bourges au format étiré en hauteur a été décoré à Paris. Il comprend quarante-trois illustrations, dont vingt-huit miniatures, ornées de cadres architecturés dorés, auxquels sont suspendus des guirlandes. Les pages du calendrier, ainsi que les pages de texte des offices et des suffrages sont encadrées de bordures à motifs d'arabesques, de fleurs coupées et d'insectes sur fond d'or, dans la tradition ganto-brugeoise.

  La composition et l'iconographie des peintures présentent des caractéristiques qui font écho à la production des principaux enlumineurs et graveurs actifs à Paris, vers 1510, dans l’entourage de Jean Pichore.

  L'illustration de l'office des morts par la figure biblique de Job sur son fumier, malade et dépouillé de tout, moqué par ses amis est un sujet à la mode depuis la fin du 15e siècle pour illustrer cet office sur le thème du détachement des biens terrestres. 

  L'ex-libris qui figure au contreplat et au feuillet 1 évoque la date de 1530 et le nom quelques peu mystérieux de Jérôme Duchesne. On ne connaît, à ce jour, qu'un Jérôme Duchesne, notaire à Issoudun cité de 1580 à 1601.

Pierre-Gilles Girault

Conservateur et directeur adjoint, château royal et musées de Blois

Livre d'heures, Jean Pichore, Tours

  Ces deux miniatures, provenant d'un livre d'heures et désormais isolées, sont apparentées à celles produites dans l'atelier du peintre parisien Jean Pichore, à l'orée du XVIe siècle. Les personnages au visage plein, au nez droit et à la forte ligne de mâchoire, ainsi que la palette tout à la fois adoucie par l'or mat, le blanc, et les déclinaisons de bruns et éclairée par les bleus et les verts font partie des caractéristiques majeures de son oeuvre. Les deux compositions citent très précisément des schémas répétés par le maître et son atelier tout au long de sa carrière. Lazare et le banquet du Mauvais riche, sujet rarement traité dans les livres d'heures, demeure cependant l'un des sujets fréquents chez cet artiste. L'encadrement monumental, sans cesse répété dans les manuscrits produits dans l'atelier de Pichore, permettait d'accentuer la profondeur des compositions.

Pascale Charron

Maître de conférence en histoire de l'art du Moyen-Âge

Université de Tours