Le Calendrier de la guerre de Hermann-Paul, 1916
La première série du Calendrier de la guerre de Hermann-Paul, Paris, 1916
Longtemps défenseur de la paix, le dessinateur de presse René-Georges Hermann Paul (1864-1940), dit Hermann-Paul, a néanmoins fortement contribué pendant la Grande Guerre au patriotisme et au bellicisme exacerbés, par son œuvre engagé. Pour la librairie parisienne Lutétia, il réalisa ainsi trois séries de gravures sur bois taillées au canif intitulées Le Calendrier de la guerre – dont la dernière est restée inédite. Le Musée de l’image conserve dans ses collections un exemplaire de la première série, publiée en 1916. D’août 1914 à juillet 1915, elle retrace dès la mobilisation la première année du conflit.
Sur ces gravures de facture minimale, le sang ne coule pas. Néanmoins, les tragédies de la guerre sont bien là : un cadavre allemand gît en septembre, un vieil homme blessé sort péniblement des gravats après le bombardement de la cathédrale de Reims en octobre, une croix suggère une tombe enfouie sous la neige en janvier, une femme se noie et tente désespérément de sauver son enfant en février.
De la bataille de la Marne au détroit des Dardanelles, en passant par les Carpates, l’Yser en crue ou les Alpes italiennes, les planches révèlent aussi l’étendue géographique du conflit. Souvent en uniforme, le soldat est représenté dans la diversité de sa provenance, armée française mais aussi étrangère, comme en décembre avec l’enrôlement de volontaires de l’armée britannique. Et selon son appartenance à un corps d’armée tels que l’infanterie, la marine ou pour l’artillerie, aux commandes d’un tank.
Figure récurrente de ce calendrier, la femme apparaît dans son rôle de soutien affectif aux soldats : en tant que bien-aimée, elle serre une dernière fois dans ses bras son fiancé dont le départ est imminent ou se promène avec son époux main dans la main et tente de lui apporter douceur, joie et distraction pendant sa permission. Mais elle est aussi présentée œuvrant à l’arrière : l’infirmière porte secours au blessé et la « munitionnette », épaulé par un garçonnet, participe à l’effort de guerre en produisant des obus.
En treize gravures au style épuré sont donc évoquées de nombreuses facettes du conflit mondial pendant ses premiers mois.
Pour aller plus loin
ANZALONE John, « Hermann-Paul et la Guerre sur bois » IN Bulletin du bibliophile, 2009, n° 1, pp.142-162.
HARRIS Neil, EDELSTEIN Teri J., En guerre : French Illustrators and World War I [catalogue d’exposition], Chicago : The University of Chicago Library, 2014. pp. 68-72.
PAUTRE Véronique, « Hermann-Paul, un dessinateur partisan entre antimilitarisme et bellicisme » IN Nouvelles de l’Estampe, 2005, n° 197-198, pp. 41-54.
SADION Martine, « En juillet les permissionnaires » IN 14/18 L’enfant découpait les images [catalogue d’exposition], Épinal : Musée de l’Image, 2014. pp. 72-73.
Marie Poulain, documentaliste
