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Œuvre : Précisions - Dieu massue
Dieu bâton | Espace WebMuséo Musenor

Statut de l'oeuvre : 
N° d'inventaire : 
990.2.2105

Dénomination : 
Lieux création, exécution : 
Date de création ou d'exécution : 
19e siècle
Techniques et matériaux : 
Bourre de noix de coco, Tapa, bois

Dimensions : 
Longueur maximum en mm. : 700
Largeur maximum en mm. : 120
Epaisseur maximum en mm. : 100

Description : 
Dieu massue, sculpture en bois enveloppé de 2 épaisseurs de tapa entourée de cordelette. Sur cette sculpture sont fixées de longues fibres végétales.
En fait, le démontage de l'ensemble laisse apparaître :
- Une première épaisseur de tapa, relativement épais mais fin, clair et jaunâtre.
- Une seconde épaisseur en dessous, rouge foncé, enduit d'huile et en plusieurs couches et en plusieurs tours.
- Un morceau de sculpture en bois, sans doute tronqué du côté opposé aux fibres. Les fibres, un faisceau de fils de bourre de coco ou de fibrillium, sont tenues sur la partie non sculpté, circulaire du bois par une cordelette de même nature enroulée en sept tours sur elle. Du côté tronqué, une longue cordelette en sennit fine et régulière passe par les arches de la sculpture et fait de volutes quasi naturellement ? Cette cordelette servait-elle à ficeler le paquet ? Mais il n'y a pas l'ombre d'une plume (ou d'un morceau de plume) dans ce paquet ! A.Renard, restaurateur.

Représentation de Divinité. Iles Cook. Militario. Un objet de même type que les numéros 2103 et 2103 bis, il est entouré d'un rouleau de tapa maintenu en place par une corde en bourre de coco tressée. A une extrémité du rouleau, on voit un fragment de bois sculpté qui dépasse, mais l'objet est cassé et on ne distingue qu'une seule rangées d'arches. De l'autre extrémité sortent de longs faisceaux de bourre de coco. Selon Buck, les "Dieux" de Mitiaro pouvaient être munis d'ornements en bourre de coco à la base. Ici, la partie manquante est vraisemblablement la "tête" avec dôme sommital ; il est possible d'autre part que le tapa serve à protéger des ornements en plumes, mais si ceux-ci existent, ils sont invisibles. De toutes façons, il s'agit d'une pièce exceptionnelle. Seul un exemplaire du British Museum a ainsi conservé ses décorations de plumes et de bourre de coco.
Commentaires :
Bien que les objets décrits ci-dessous soient très rares, il est possible de donner à certains d'entre eux, par
comparaison avec d'autres pièces, une origine et une fonction au moins probables : c'est le cas des n°2099, fig.38
; 2103 et 2105, fig.40. En revanche, les objets de la figure 39 sont beaucoup plus difficiles à déterminer, parce
qu'ils semblent exceptionnels et n'avoir été représentés nulle part. Au premier abord, ils rappellent les chasse mouches tahitiens, avec des formes encore plus stylisées, plus loin des personnages humains originels. Mais ils
gardent un style nettement "Iles Cook".Or, I°) P.Buck ne mentionne pas de chasse-mouches pour les îles Cook et
2)) l'attache de la bourre de coco aux manches paraît trop grossière pour avoir appartenu à de tels objets de
prestige.
L'analyse des formes de ces trois objets montre qu'ils ont bien des caractères communs avec les planchettes unu
d'Aitutaki, mieux connues comme on l'a vu avec le n°2099, et décrits par des auteurs différents : on y voit les
mêmes découpures latérales en triangles, accompagnées de triangles en creux, qui dans l'hypothèse de Stolpe
représenteraient des êtres humains. On peut y voir également une série de variations sur le thème chevronlosange dont parle Buck. Le trou central en forme de losange est visible sur une sculpture illustrée dans les
"Polynesian Researches" (Ellis, vol.2, frontispiece 2,P.224 de l'édition française) et sur un exemplaire simplifié
du British Museum (L.M.S., coll.112, in BUck, fig.203a) qui, par la forme et le sommet en triangle, sont très proches du n°2100 de Lille. Buck assimile ces deux objets aux planchettes unu de Aitutaki. On peut donc émettre l'hypothèse que le objets de la figure 39 sont des variantes peu connues, plus étroites, démunies de base à enfoncer dans la terre ou les pierres, des planchettes unu d'Aitutaki. On a vu que ces planchettes pouvaient recevoir parfois elles aussi des décorations en bourre de coco et même en plumes.
Mais on peut faire également des rapprochements entre ces planchettes et les images des dieux de Mitiaro,
décrites par P.Buck. Elles ont en commun en particulier le fameux petit motif en relief chevron-losange qui
apparaît aussi nettement par exemple sur la planchette unu du Musée d'Otago (Duff, fig.117) que sur n'importe
quel "Dieu" de Mitiaro.
Sans vouloir remettre en question les tentavives de Buckpour localiser de façon précise ces objets religieux , on
pourrait montrer qu'il n'existe pas sur le plan typologique, de véritables solutions de continuité entre eux.
A Pukapuka (E. et P. Beaglehole, 1938,P.319-320) : "The only representation of gods known to to informants
was the slab of uncut stone (unu) that rested on the encolure"... "The sacred encolure corresponds to the religious marae of other parts of Polynesia".
Ailleurs, à Tahiti et aux Cook en particulier, les unu (9) sont en bois découpé et de dimensions très variables,
mais leur forme générale est dérivée de la planche (section rectangulaire) ce qui les distingue des objets religieux
issus du bâton (section circulaire) ;
Pourtant sur la plupart de ces objets de Polynésie centrale, qu'ils soient sculpté de formes humaines plus ou
moins réalistes, ou qu'ils paraissent entièrement non figuratifs, on peut distinguer des caractères communs :
- le sommet est souvent découpé en convexité ou façonné en dôme (quelques planches sculptées d'Aitutaki, des
îles de la Société sur les somms, des dalles calcaires élevées sur les marae avaient parfois leur sommet découpé
et convexe ; dieux de Mitiaro)
- le motif chevron-losange, simple ou répété, petit ou grand, en relief ou en creux, apparaît presque toujours sur
ces objets dont l'origine religieuse n'est pas vraiment prouvée et qui sont ls chasse-mouches tahitiens : les deux
personnages adossés déterminent de profil, avec la ligne continue des têtes et le quasi losange circonscrit par les
bras et les jambes, une figure schématique qui ressemble bien au motif en question. Il est curieux retrouver de
face sur les objets de la figure 39, des lignes qui sont l'armature du profil sommital des chasse-mouches tahitiens.
Que le double personnage stylisé soit à l'origine de certains motifs en losange est très visible sur un ornement de
pirogue sacré de Huahine illustré dans Ellis (1972, P.224,fig.16,4).
- pour le corps de l'objet ou le manche, il faut distinguer les objets plats à découpures latérales triangulaires des
objets issus du bâton, à quatre ou cinq arêtes rayonnantes pleines ou découpées en arches comme sur les "dieux"
de Mitiaro. Il semble bin que Stolpe ait raison en voyant dans les découpures latérales accompagnées de triangles
en creux, des représentations schématiques de personnages superposés. D'autre part, bien qu'elles soient
aussi loin du motif d'origine - le corps humain - les arches sont une réminiscence des sculptures humaines
superposées : des témoins plus figuratifs que les "dieux" de Mitiaro apparaissent comme des jalons entre les
sculptures très réalistes des personnages en cariatides et les motifs très abstraits et partiels des arches (cf .Duff :
le dieu de Mangaia de la figure 115, on distingue très nettement les petits personnages formant les arches). Mais
le triomphe de l'abstraction, on le trouve sur un des deux types de chasse-mouches tahitiens, celui dont le manche est marqué de plusieurs arêtes longitudinales dans l'axe de l'objet, la section transversale étant elle aussi rayonnante comme dans les exemplaires à arches (cf Oldman, pl.12) : ici les représentations humaines ne sont plus que très lointainement évoquées par des chevrons superposés. Mais, comme rappel de l'origine de ces motifs, on trouve, renvoyé tout autour d'une bague en relief, des figures humaines déjà beaucoup plus nettes, bien qu'encore très stylisées.
Sur l'autre type de chasse-mouches tahitiens, il est plus difficile d'interpréter les troncs de cônes superposés
comme des représentations humaines superposées, même très stylisées. Mais cette difficulté d'interprétation
vient peut-être de la disparition des jalons stylistiques nécessaires sue l'on aurait trouvés autrefois à Tahiti :
poteaux sculptés indiquant la propriété indiquant la propriété d'un arii ornant la proue des pirogues d'apparat, ou
signalant l'existence d'un interdit rahui (en Nouvelle-Zélande des pierres destinées à marquer le rahui étaient
sculptées de chevrons disposés de chaque côté d'une arête comme sur le premier type de chasse-mouches tahitiens ; cf Archey, 1967,fig.37).
Il reste à faire état d'un dernier caractère commun à tous ces objets y compris les chasse-mouches tahitiens, c'est
la possibilité qu'ils avaient de recevoir des ornements en bourre de coco, en plumes et en nacre (cf. l'exemplaire
de chasse-mouches du Musée de Vienne in Moschner) l'objet chasse-mouches et sa fonction ne semblent pas souvent cités dans la littérature ancienne : pou tahirile dictionnaire de Davies donne le sens d'éventail, mais le mot tahiri ra'a qui selon le catalogue " la découverte de la Polynésie" désignait les chasse-mouches, n'apparaît pas dans l'ouvrage.
Le chasse-mouches tahitien, tel que nous le connaissons, ne figure pas non plus parmi les regalia, les insignes des principaux chefs des îles de la Société, énumérés par Marau (1971,P.81). seul l'éventail est mentionné. On trouve aussi dans le "Tahiti aux temps anciens" de T.Henry (1962,P.201), cité parmi les insignes royaux "un tahiri (éventail) qui était constitué par plusieurs plumes de la queue de la frégate, attachées ensemble, le tout à l'extrémité d'un long manche et ressemblant au kahili royal de Hawaii".
Mais Handy (1930, P.35) dans une énumération des insignes royaux qu'il tient sans doute de Marau Taaroa,
désigne sous un même nom (tahiri), l'événtail (fan) et le chasse-mouches (fly-flan).
On constate donc une certaine confusion entre les deux objets qui semblent porter en tahitien le même nom
tahiri. On sait pourtant que les deux formes aux techniques très différentes, l'éventail en vannerie (cf.Buck, 1944,
fig.264, d) et le "chasse-mouches" avec fibres de coco ont dû coexister aux îles de la Société, encore que les rares éventails tahitiens proprement dits qui soient connus ne sont pas très sûrement localisés.
Un prototype, si l'on peut dire, de chasse-mouches, apparaît sur une gravure d'objets tahitiens, dessinés par
Sydney Parkinson (premier voyage de Cook). Le manche en bois dur (probablement Casuarina) de 32,5cm de
long est sculpté au sommet en forme de ti'i simple ou double ; le reste est uni, avec à la base un élargissement
percé d'un trou. Dans ce trou passe un anneau de corde auquel est attaché un bouquet de plumes. Il existait aussi
des formes classiques portant des plumes à la base. C'est le cas exemplaire du Royal Scottish Museum, edinburgh, à double image sommitale et manche sculpté de chevrons (cf.Wingert, 1962, fig.92).
Dans son étude sur Samoa (1930,P.662).P.Buck établit une distinction entre la fonction de chasse-mouches en
fibre de coco à Samoa, en plumes à Hawaii, tous deux utilisés comme emblème de chef et un objet en bois et en
feuilles, qui, en Nouvelle-Zélande servaient à protégér les cadavres des mouches (cf.également Buck, 1957,P.578- 580). Mais il ne fait allusions ni à l'origine, ni à la fonction exacte des chasse-mouches de Tahiti.
Il ne semble pas que l'on trouve dans les récits des anciens voyageurs d'allusions particulières aux chasse-mouches tel qu'il est parvenu jusqu'à nous. En revanche, on trouve de fréquentes mentions de plumes rouges apportées par des voyageurs, en rites de paix ou en conjuration d'un mauvais sort éventuel (marotai), ou en signe de réconciliation après une guerre (manufaite). Les symboles de paix les plus souvent échangés entre les vsituers et leurs hôtes étaient : des branches vertes, surtout des pousses de bananiers ; de la nourriture, cochons, fruits,
poissons ; mais les plumes rouges semblent avoir été le cadeau le plus prisé par les polynésiens. Il est aussi
question dans les textes anciens des "amulettes" offertes par les voyageurs à ceux qui les reçoivent et réciproquement.
Lorsque des heurts sanglants se sont produits entre les tahitiens et l'équipage du Capitaine Wallis, une
amulette de plumes rouges et jaunes est offerte aux anglais, soit en signe de paix, soit pour assurer la victoire des
polynésiens (cf.T.Henry, 1928,P.13).
Il est impossible d'étudier ici certaines relations originelles à caractère religieux comme "bananier-homme" ou
"plumes rouges-émanation partielle des ancêtres divinisés", mais on peut comprendre, si on s'en tient à l'exemple
des plumes rouges (10), comment d'objets à signification religieuse, elles sont devenues progressivement un
gage de paix, un emblème de l'aristocratie et pour finir une simple monnaie d'échange (Cook in beaglehole,
1967,P.187).
On connaît, on l'a vu plus haut quelques objets de transition entre les représentations des dieux en bois sculpté et
les objets dits "chasse-mouches". A l'origine, la sculpture apparaît plus comme un symbole, support pour des
matériaux rendus sacrés, que comme une partie d'un objet fonctionnel servant à chasser les mouches. (A Tahiti,
on éventait les malades avec des feuilles ou des bouquets de feuilles de 'uru, cf.Maximo Rodriguez, P.25 et 45 ;
"il priait Teatua de rendre la santé à l'arii. D e chaque côté de Vehiatua des serviteurs l'éventaient sans arrêt avec
des bouquets de feuilles d'uru. Je leur dis de cesser mais ils ne veulent pas m'obéir parce qu'ils disent qu'ainsi ils
incitent leur dieu à descendre et que ce dieu donnera la santé à leur chef")
Il paraît probable que l'"amulette" ou représentation portative des "dieux", assez petite pour être transportée en
voyage et offerte à l'arrivée en signe de paix, s'est peu à peu transformée en insigne de chef propre à devenir un
cadeau de valeur et peut-êre dans la dernière période des échanges quasi commerciaux avec les Européens, en
une simple monnaie. L'objet aurait alors acquis la forme définitive qu'on lui connaîtet qui ressemble à celle des
chasse-mouches.
Si j'ai particulièrement insisté sur l'analyse des formes et des décors de ces objets religeiux des îles Cook, c'est
parce qu'ils sont pau nombreux et mal connus. Et à la suite de cette analyse, il m'a paru évident qu'il existait des
relations formelles entre ces objets et ceux qu'on appelle "chasse-mouches" aux îles de la Société. Il faudrait
maintenant pouvoir mettre en corrélation les analyses de ces objets religieux avec les connaissances que nous
possédons sur la religion anciennes et les relations sociales en Polynésie Centrale, les unes pouvant peut-être
éclairer les autres. Mais ce sera là un autre travail.
Anne Lavondes.

Mode d'acquisition : 
Date d'acquisition : 
09/07/1990
Utilisations, destinations : 
Fonctionnement : 
Généalogie ; Religion

Date de dernière modification : 
28 novembre 2023 17:58 Europe centrale/Paris (ECT) +01:00
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