987.4.1

73-74E-149x139

20e siècle (3e quart) 1973 1974

Acrylique sur toile

Hauteur en cm : 149 Largeur en cm : 139

Cette peinture exécutée à l'acrylique, fait partie d'une suite de 18 toiles exposées du 8 octobre au 2 novembre 1974 Galerie Daniel Templon à Paris. Particulièrement depuis son retour à la peinture en 1972, après une interruption de près de cinq ans, Martin Barré travaille par séries dont tous les termes sont apparentés. Lers proportions sont calculées au Modulor (système de mesure mis au point par Le Corbusier), en suivant les rapports définis par la section d'or (jusqu'aux toiles de 1974-75). Le format de base est un rectangle un peu plus haut que large, suffisamment pour que ne puisse venir à l'esprit l'image d'un carré. Celui-ci est en revanche inscrit, disposé en oblique de gauche à droite et coupé par le bas du tableau ; les tracés qui délimitent cette inscription vont au bleu foncé au bleu clair. Ce grand espace ainsi balisé est à nouveau subdivisé en quatre et les diagonales recoupent les carrés engendrés ; les tracés intérieurs ne sont pas menés jusqu'au point de rencontre avec la figure mère de couleur bleue, mais au centre est inscrit un carré privilégié qui adopte la même position oblique. Une succession de marquages bleus et d'ocre clair, progressant du froid au tiède et de bas en haut, occupe le carré central. Les traces du pinceau se juxtaposent, puis par endroits se superposent, en admettant, surtout à gauche de bas en haut, de légers débords de la teinte. La souplesse du marquage, assez large, révèle la pesée de la main et le caractère physique de la trace. Toute insistance démonstrative est déjouée par le voile clair qui, à la manière des anciens glacis, recouvre la trame, de même qu'en haut à droite, sur le côté et en bas à gauche, des marquages parallèles se laissent deviner, affleurant du fond comme une sous-couche, qui se déplace d'ailleurs aussi, dans la même teinte, sous le carré. Démonstration efficace de la mesure et de la touche, régis par l'ordre initial du tableau. "Vous savez comment je procède : grille... hachuré... recouvrement... et ça recommence" disait Martin Barré (in Documents IV-V, mars 1976, Christian Bonnefoi, Entretien avec Martin Barré, pp.67-72, Cahiers d'histoire de l'Art contemporain, Saint Etienne, 1976). Le charme - au sens valéryen du terme : poème - vient de la naissance presque insolite de la couleur et de la vitalité du geste comblant sans violence un espace fait pour elles et qui vient s'y poser comme à tâtons, dans une expérience neuve où le fortuit joue son rôle. D'où ce flottement léger. La pose de la couleur, si caractéristique, se souvient des tracés à la bombe aérosol perpétrés entre 1963 et 1967. A noter la suggestion plus intense du relief dans la zone où les couleurs s'ajoutent l'une à l'autre. Mesure d'un espace vierge que l'on commence de baliser, premiers fards enjolivant un cadastre ancestral : cette abstraction n'est ni géométrique, ni lyrique, ni constructiviste, termes d'école désormais ; elle relève d'opérations fondamentales de l'esprit humain, devenues art. M.-A. S.

Au verso s. et titré h.g. "M. Barré 73-74E-149x139"

Art Press, n° 183 Martin Barré, Arc, Paris, 1979 "Carton d'invitation à la présentation des "Halte à l'immobilisme", Musée de l'Hospice reprod. STALTER Marcel André, STOULLIG Claire, HINDRY Ann, reprod. p. 87 Benezit, dictionnaire Hazan, 1992 "Martin Barré, les années quatre-vingt", La Voix du Nord, Tourcoing, Le musée de poche, "Les démarches singulières de Martin Barré", mardi 4 janvier 1994 ALLEMAND Evelyne-Dorothée, Dix ans d'acquisition pp. 268-269, reprod. coul. p. 267