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Des musées et des hommes

Hermann Burg ? au bureau du conservateur du musée de Valenciennes, vers 1917. Valenciennes, musée des Beaux-Arts, fonds Bauchond.
 
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Hermann Burg ? au bureau du conservateur du musée de Valenciennes, vers 1917. Valenciennes, musée des Beaux-Arts, fonds Bauchond.

L’histoire des musées et de leurs collections pendant la Première Guerre mondiale est avant tout une histoire humaine. Elle met en scène des hommes pris entre leur devoir national et leur passion pour l’art. Français et Allemands se retrouvent dans une volonté commune de préserver le patrimoine en danger. Leurs actions restent néanmoins soumises à des enjeux politiques divergents qui en font des ennemis. 

 Côté allemand             

Côté allemand, un service appelé Kunstschutz (protection de l’art) se met en place en Belgique fin 1914 et dans les zones occupées en France à partir de 1916. Créé à l’instigation de Wilhelm von Bode et Paul Clemen, ce service est rattaché à l’armée. Les historiens d’arts dépêchés en France portent l’uniforme, ce sont les Kunstoffiziere (officiers de l’art), parmi lesquels se trouvent des conservateurs et des archéologues renommés.

► Wilhelm von Bode (1845-1929)

Historien d’art allemand, il fonde en 1904 le Kaiser-Friedrich-Museum de Berlin (aujourd’hui Bodemuseum) et prend la direction générale des collections d’art de l’État. Il a présidé la reconstruction des musées de Strasbourg détruits pendant la guerre de 1870. Instigateur du Kunstschutz, avec Paul Clemen, c’est lui qui en pilote les actions depuis Berlin.

Illustration: Wilhelm von Bode, vers 1914. Berlin, SMB-PK/ZA. 

► Hermann Burg (dates inconnues)

Historien d’art, il est l’un des Kunstofficiere, nommé expert artistique de la 2e armée, chargé des inspections d’étapes (Cambrai, Douai, Valenciennes) entre 1916 et 1918. Nommé conservateur en chef des musées de Valenciennes en 1917 par Theodor Demmler, il y accueille les collections des musées de Lille, Cambrai et des autres musées et collections privées du Nord occupé.

Illustration: Hermann Burg ? au bureau du conservateur du musée de Valenciennes, vers 1917. Valenciennes, musée des Beaux-Arts, fonds Bauchond

► Paul Clemen (1866-1947)

Professeur d’histoire de l’art à l’Université de Bonn et de Düsseldorf, il est nommé en 1893 conservateur du patrimoine de la Rhénanie. Co-instigateur du Kunstschutz avec Wilhelm von Bode, il publie après la guerre Kunstschutz im Kriege (1919) qui retrace notamment les différentes mesures de protection du patrimoine menées pendant le conflit par les armées allemandes et autrichiennes sur les fronts occidentaux et orientaux.

Illustration : Paul Clemen dans une église détruite. Sans date, ni lieu. Rheinisches Amt für Denkmalpflege, Abtei Brauweiler Nachlass Clemen 

► Theodor Demmler (1879-1944)

Directeur-adjoint du département des sculptures du Moyen âge et de la Renaissance au Kaiser-Friedrich-Museum de Berlin, il devient Kunstoffizier en charge de la préservation du patrimoine artistique pour le front Ouest en 1916. Commissaire et auteur du catalogue de l’exposition du musée de Valenciennes de mai 1918, il fut également le supérieur hiérarchique des autres Kunstoffiziere

Illustration: Theodor Demmler, vers 1916. SMB- PK/ZA, NL Demmler, n° 1

► Richard Goetz (1874 – 1954)

Peintre et collectionneur allemand, Richard Goetz réside à Paris au moment de la déclaration de guerre. Sa collection d’art moderne est alors saisie, considérée comme « bien ennemi ». Elle ne lui sera jamais rendue. Sergent dans l’armée allemande, c’est lui qui décide notamment de l’évacuation de la bibliothèque du château de Sart, dans le Nord, et finit à ce titre par être détaché comme « expert artistique » au sein du Kunstschutz auprès de Demmler et von Hadeln à Lille en juin 1917.

Illustration: Autoportrait en militaire. Dessin à l’encre sur papier, vers 1917 ?. Collection privée

► Detlev von Hadeln (1878-1935)

Historien de l’art, spécialiste de la peinture vénitienne, il est nommé Kunstoffizier par Theodor Demmler. En 1917, il organise notamment l’évacuation des collections publiques et privées de Saint-Quentin vers Maubeuge, où il transforme un ancien magasin, AU PAUVRE DIABLE, en musée. Il y présente les pastels de Quentin de La Tour provenant du musée Lécuyer détruit, dans des petits salons qui rappellent l’ambiance du XVIIIe siècle.

Illustration : Detlev von Hadeln en militaire, vers 1900. Collection privée

► Christian Rauch (1877-1976)
Historien d’art, archéologue et architecte allemand dans le civil, il est commandant d’une unité de la Croix-Rouge à Douai pendant la guerre. Il s’installe au musée, dont il se déclare conservateur, au tournant 1914-1915. Requis par Demmler dans le cadre du Kunstschutz pour inspecter les collections privées dans la région de Douai, il quitte cette dernière en 1917 pour prendre en charge une partie de l’inventaire photographique du patrimoine artistique belge.

 Côté français              

Côté français, un service dédié à la protection des œuvres d’arts est officiellement créé en mai 1917 sous la responsabilité conjointe du Ministère de la guerre et du Ministère de l’instruction publique et des Beaux-arts. Fernand Sabatté, peintre de formation, prend la tête de la section du front Nord. En réalité, c’est la continuation du travail qu’il effectue sur place depuis la destruction en 1915 de l’abbaye Saint-Vaast d’Arras. Cette section effectue ses missions dans une zone essentiellement contrôlée par l’armée britannique.

De leurs côté, les conservateurs font face au conflit selon leurs moyens, souvent dans l’urgence et l’improvisation. En zone occupée, ils conservent leurs fonctions mais doivent composer avec la présence de l’occupant… ce qui ne se fait pas sans heurts ni tensions.

► Fernand Sabatté (1874-1940)

Elève de l’atelier de Gustave Moreau à l’Ecole des Beaux-Arts de Paris, premier grand prix de Rome en 1900, il est mobilisé en 1914, nommé en 1917 lieutenant d'administration du génie et chef du service d'évacuation des œuvres d'art de la zone des armées pour le front du Nord (départements du Nord, du Pas-de-Calais et de la Somme) Il meurt fauché par un camion allemand en 1940.

Illustration: Fernand Sabatté dans son bureau du dépôt d’Eu, février 1918 (Médiathèque de l’Architecture et du Patrimoine, DU000295).

► Maurice Bauchond (1877-1941)
Avocat, bibliophile, historien et archéologue valenciennois, il est nommé conservateur des collections des quatre musées de la ville en 1914. Au début de la guerre, il met en sûreté les objets d’art les plus précieux mais ses fonctions sont restreintes en 1917 lorsque les Allemands choisissent Valenciennes comme dépôt régional des collections artistiques du Nord de la France occupé. Après la guerre, son attitude jugée trop conciliante avec l’occupant lui sera reprochée.

► Paul Bellette (1860-1938)
Notable douaisien, il est nommé conservateur du musée de Douai en 1908. Il reste en poste pendant la guerre et n’a de cesse de s’opposer aux ordres donnés par les Kunstoffiziere, qu’il surnomme les « sauveurs officiels ». Epuisé par ces années de guerre, il est placé d’office à la retraite en 1919.

► Maurice Hénault (1867-1945)
Archiviste bibliothécaire du musée des Beaux-arts de Valenciennes, il conserve son poste en juin 1917, lorsque l'Allemand Hermann Burg devient administrateur du musée. Au moment du transfert des œuvres vers Bruxelles est décidé par les Allemands en octobre 1918, il est chargé du contrôle des collections et participe à leur convoiement.

► Paul Léon (1874-1962)

Chef de la division d’Architecture au service des Monuments Historiques au moment où la guerre éclate, c’est lui qui préside à partir de mai 1917 la commission interministérielle de protection et d’évacuation des œuvres d’art et des monuments français.

Portrait de Paul Léon, chef du service de l’architecture, président de la commission interministérielle, à sa table de travail. Vers 1914.
Huile sur bois. Charenton-le-Pont, Médiathèque de l’Architecture et du Patrimoine, 0080/047/028

► Paul-Frantz Marcou (1860-1932)
Inspecteur général des Monuments Historiques, chargé des objets mobiliers, c’est lui qui suggère le premier, en 1916, la création d’un service spécifique chargé de la protection du patrimoine français en temps de guerre, placé sous la tutelle conjointe des Ministères de la Guerre et de l’Instruction Publique et des Beaux-Arts.

► Emile Mussault (1846-1917)
Peintre académique et élève d'Henry-Eugène Delacroix (1845-1930), il est conservateur du musée de Cambrai de 1898 à 1917. Lorsque la Première guerre mondiale éclate, il fait décrocher La mise au tombeau de Rubens de l'église Saint Géry. Épuisé par son travail de protection des œuvres menacées par la convoitise et par les bombardements, il meurt avant la fin du conflit. Le lendemain de sa mort, un obus s’abat sur sa couche funèbre.

► Émile Théodore (1876-1937)
Nommé conservateur général des musées de Lille en 1913, il est très actif pour sauvegarder les collections lors des bombardements d'octobre 1914 et parvient à cacher la Tête de Cire pendant tout le conflit. Il joue un rôle important dans la renaissance du musée grâce à son inventaire minutieux. Il aide également d’autres musées, comme celui de Bailleul, pour lequel il calcule le montant des dommages de guerre.

Remerciements : Michèle Adamczyk, Daniel Bonifacio, Marc Goutierre, Christina Kott, Gaëlle Pichon-Meunier.

 

ACMNPDC