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Les conquêtes militaires

François Watteau, dit Watteau de Lille, La bataille des Pyramides, huile sur toile, 94 x 1204 cm, Valenciennes, musée des Beaux
 
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François Watteau, dit Watteau de Lille, La bataille des Pyramides, huile sur toile, 94 x 1204 cm, Valenciennes, musée des Beaux

Napoléon Bonaparte a construit sa vie et son destin par la guerre.

Jeune noble corse, envoyé dès 1779 par son père sur le continent pour épouser une carrière militaire, il se forme à l’école militaire de Brienne puis de Paris. En participant au siège de Toulon en tant que capitaine d’artillerie et en affrontant les Anglais en 1793, il lie son sort à celui de la République, ce qu’il confirme en exécutant l’ordre de Barras d’écraser l’insurrection royaliste de 1795. Bonaparte se révèle aventurier et croit en son destin lorsqu’il devient général de division, chef de l’armée de l’intérieur puis chef de l’armée d’Italie. Ses campagnes successives en Italie (1796-1797 puis 1799-1800), en Egypte (1798-1801), en Allemagne (1805), en Autriche (1809), en Russie jusqu’à Waterloo (1815) marquent l’histoire de France et la mémoire collective de la nation.

Les œuvres sélectionnées appartiennent non pas l’actualité immédiatement rapportée, mais à la construction du récit national. Par leur expression, les artistes participent à la construction d’une vision idéalisée de l’Empire qui exalte la personnalité du général puis de l’Empereur. Les attributs de la puissance militaire et la recomposition des scènes de batailles dessinent une réalité bien différente de celle vécue par les soldats et par Napoléon Bonaparte lui-même. La bataille des Pyramides, baptisée comme telle par l’Empereur, se déroula dans un autre cadre géographique plus proche du Caire, le passage du col du Grand Saint-Bernard fut une épreuve bien plus pénible que celle présentée par Géricault prompt à faire du général un nouveau Messie, l’entrée dans Vienne se devait de suggérer le cadre majestueux de la ville en arrière-plan, la mort du maréchal Lannes participe de l’image d’un Empereur toujours proche de la Grande Armée. Même pour Waterloo, Carpeaux, peintre à la cour de Napoléon III, figure l’Empereur en héros combattant par-delà la défaite. Pour une large part, ces œuvres sont imprégnées du souci de forger la figure d’un grand homme qui sied au courant romantique.


La bataille appelée des Pyramides qui se déroule le 21 juillet 1798 (3 thermidor an VI), sur la rive gauche du Nil près du plateau de Gizeh, constitue une victoire décisive de l’armée française d’Orient conduite par le général Napoléon Bonaparte contre les forces mamelouks commandées par Mourad Bey, lors de la campagne d'Égypte (1798-1801) et permet aux Français d’entrer dans la ville du Caire le 24 juillet. Elle oppose l’armée mamelouke composée de plus de 10 000 cavaliers et 30 000 fellahs et janissaires à cinq divisions que Bonaparte fait disposer en cinq carrés de 2 000 hommes ce qui constitue une innovation stratégique. Cette victoire savamment exploitée par Napoléon et qui ébranle la domination des Mamelouks n’empêche pas l’expédition d’Egypte de se conclure par un désastre militaire.

François Watteau (1758-1823), par le traitement de ce sujet qui est pour lui d’actualité, renoue avec la peinture d’histoire et participe à l’exaltation de l'image du général vainqueur des Mamelouks. Moins soucieux de la réalité que de la mise en scène et de l’exaltation de la geste nationale, il situe le champ de bataille dans un vaste paysage panoramique et multiplie les détails spectaculaires (chocs de cavalerie, torrent qui engloutit les soldats et leurs montures). Son dessein est volontairement épique et certains éléments comme la Pyramide (alors que les combats ne se sont pas déroulés au pied des pyramides) ou l’immense drapeau tricolore au premier plan sont exagérés voire inexacts comme le chef mamelouk conduit devant Bonaparte alors qu’il n’a, en réalité, même pas été capturé.


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Théodore Géricault, Passage du Mont Saint-Bernard, 1822, lithographie, 44x 53,3 cm, Chantilly, musée Condé, Inv. 2015-0-14. Planche pour La vie politique et militaire de Napoléon par A. V. Arnault chez E. Babeuf (1822)

Le général Bonaparte, premier consul, traverse les Alpes avec les armées de réserve le 13 mai 1800 pour porter secours à l’armée du maréchal Masséna qui subit le siège de Gênes opéré par les Autrichiens. L’enjeu pour la France est de reprendre la domination sur l’Italie du Nord.

Le franchissement du col du Mont Saint-Bernard a contribué à forger le mythe de l’Empire inscrivant Bonaparte dans la lignée des grands chefs militaires, successeur du général romain Hannibal qui emprunta le même col lors de la seconde guerre punique en 218 avant J.-C.

Géricault s’attache surtout dans cette lithographie à traduire les difficultés que cause le franchissement de ce col enneigé situé à 2 469 mètres d’altitude pour une armée composée de 40 000 hommes. Au premier plan, des soldats tirent l’artillerie. En arrière-plan apparaît l’hospice du Grand Saint-Bernard qui assure depuis le XIe siècle l’hospitalité alors qu’au centre de la scène deux chanoines s’apprêtent à distribuer du pain aux soldats affamés et qu’un autre réconforte un soldat reconnaissant.

Alors que David a immortalisé cet événement en se concentrant sur la figure de Bonaparte dans son portrait équestre Bonaparte franchissant le Grand-Saint Bernard (1801), Géricault le montre avant tout soucieux de ses soldats. Légèrement en hauteur, il autorise d’un geste solennel la distribution des pains et semble capable de renouveler le miracle de leur multiplication.

Cette lithographie fait partie d’un ensemble de 31 gravures de Géricault rassemblées dans un portefeuille. Elle est destinée à illustrer l’ouvrage d’A-V Arnault, La vie politique et militaire de Napoléon, paru entre 1822 et 1826. L’Ecole des Beaux-Arts de Paris conserve le dessin préparatoire de cette gravure, le Palais des Beaux-Arts de Lille conserve une autre étude à la mise de plomb.

Bibliographie : DELTEIL Loys, Le peintre graveur illustré (XIXe-XXe siècles), tome 18, Théodore Géricault, Paris, 1924, note n°44.


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Camille Roqueplan, Entrée de Napoléon Ier à Vienne en 1805, 27,2 x 22 cm (sans cadre), Arras, musées des Beaux-Arts, Inv. 904.1.10 - Musenor

Cette toile de Camille Roqueplan (1803-1865), peintre paysagiste affectionnant les scènes historiques, est une reconstitution postérieure de l’entrée de l’Empereur dans Vienne, capitale de l’empire austro-hongrois, le 14 novembre 1805. Le motif historique occupe la moitié inférieure du tableau et met en scène Napoléon Ier, monté sur son cheval blanc, entouré de ses maréchaux et généraux alors qu’il s’apprête à entrer dans la ville dont on devine certains monuments.

La campagne d’Autriche débute le 28 août 1805 lorsque l’armée française quitte le camp de Boulogne et prend la direction de l’Allemagne pour aller aux devants des armées autrichiennes qui s’y sont regroupées et qui menacent la France. L’objectif est d’empêcher les Russes de porter secours aux Autrichiens en les prenant de vitesse. Les armées autrichiennes sont vaincues à Elchingen le 14 octobre 1805 puis à Ulm entre le 15 et le 20 octobre 1805. L’armée russe dirigée par le maréchal Koutousov décide de se replier sur la rive gauche du Danube laissant Vienne sans défense. Le général Murat, à la tête des premières troupes, entre dans Vienne dès le 13 novembre 1805. Le lendemain, Napoléon Ier fait son entrée et s’installe au château de Schönbrunn, résidence de l’Empereur d’Autriche, François Ier, qui s’est enfui.

La bataille d’Austerlitz, le 2 décembre 1805, parachève cette victoire et porte Napoléon au sommet de son pouvoir : il est alors « le Maître » des empereurs de Russie et d’Autriche.


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Pierre Narcisse Guérin, Mort du maréchal Lannes, huile sur toile, 3,2 x 4,81 m, Valenciennes, musée des Beaux-Arts, Inv. P.46.1.121- Musenor

Pierre Narcisse Guérin (1774-1833) est un peintre officiel qui répond aux commandes des différents régimes politiques mais qui n’a exécuté que deux œuvres liées à l’histoire napoléonienne : Bonaparte pardonnant aux révoltés du Caire et cette huile sur toile qui est une commande destinée à commémorer la deuxième campagne d’Autriche de 1809 au cours de laquelle Vienne est de nouveau prise par les Français.

Ce tableau resté inachevé exalte le souvenir de Jean Lannes, premier duc de Montebello (1769-30 mai 1809) qui fut l’un des meilleurs généraux de la Révolution et de l’Empire et fut élevé à la dignité de maréchal d’Empire lors de la première promotion en 1804. Engagé volontaire en 1792, il s’est attaché à la fortune de Bonaparte depuis les premières campagnes d'Italie. Il est présent sur les champs de bataille en France, en Italie, en Egypte, en Syrie, en Prusse, en Pologne, en Espagne  et en Autriche et s’illustre par ses qualités de bravoure (Saragosse, Montebello), de chef d'avant-garde (Friedland, Aspern-Essling) ou de manœuvrier (Ulm, Iéna). Lors de la bataille d’Essling (21 mai 1809), il est blessé au genou par un boulet et meurt quelques jours plus tard des suites de son amputation. Guérin saisit l’instant où l’Empereur reconnait le maréchal porté sur un brancard de fortune, s’agenouille auprès de lui et le serre dans ses bras manifestement affecté par la perte d’un ami qu’il nommait « le Brave des braves ». Plusieurs militaires assistent à la scène qui se tient sur un fond de paysage au ciel tourmenté : un cuirassier agenouillé porte son bâton de maréchal, un Mamelouk tient son chapeau et un soldat, assis au premier plan, laisse apparaître sa profonde affliction.


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Jean-Baptiste Carpeaux, Napoléon à Waterloo, entre 1863 et 1864Plume, encre brune, lavis d'encre brune et crayon Conté sur papier blanc, 24.7x33.2 cm, Valenciennes, musée des beaux-arts © RMN/ Thierry Ollivier - Musenor

La  bataille de Waterloo en Belgique oppose, le 18 juin 1815, l’armée française du Nord dirigée par l’Empereur Napoléon Ier qui a repris le pouvoir trois mois plus tôt à l’armée des Alliés dirigée par le duc de Wellington composée de Britanniques, d’Allemands et de Néerlandais rejointe par l’armée prussienne.

Jean-Baptiste Carpeaux (1827-1875) représente l’Empereur au milieu de ses hommes, à cheval, voulant comme l’indique l’inscription manuscrite « lui-même donner la dernière charge ». Par quelques traits vigoureux, ce peintre de la cour de Napoléon III contribue à nourrir le mythe en montrant Napoléon éternel combattant. A l’arrière-plan le champ de bataille qui se déroula au Mont-Saint-Jean est esquissé. De fait, cette bataille est la dernière à laquelle Napoléon prit part. Particulièrement meurtrière (9 500 morts, 30 000 blessés, entre 8000 et 10 000  prisonniers côté français), elle se solde par une terrible défaite de l’armée française et marque la fin de la période des Cent jours. Quatre jours plus tard, le 22 juin 1815, de retour à Paris, Napoléon est forcé d’abdiquer.


Bibliographie

DELTEIL Loys, Le peintre graveur illustré (XIXe-XXe siècles), tome 18, Théodore Géricault, Paris, 1924, note n°44.

Catalogue du Musée d’Arras, 1807, notice n°441.

Musée de Valenciennes. Guide des collections, Trouville-sur-Mer, Edition Librairie des Musées, 2013.

 

Myriam Boyer