Les fragments de cuir mis au jour lors des fouilles du puits du donjon du château-résidence de Mehun-sur-Yèvre durant l’hiver 1981/82 sont des pièces remarquables. Matière organique, le cuir se décompose rapidement au contact de l’humidité et de la terre. Il est donc relativement rare d'en retrouver en fouilles : à ce titre, les découvertes de pièces en cuir, comme les fourreaux décorés des Jacobins-Raynaldy à Rodez, les pièces de Strasbourgs ou les chaussures de Saint-Denis restent exceptionnelles. Malgré leur fragmentation importante, les éléments de Mehun sont peints et gravés de motifs délicats, notamment des bandes et des oiseaux enchâssés dans des cercles poinçonnés. La finesse des motifs s’associe aux techniques de gravures et aux différentes polychromies relevées, démontrant un objet raffiné et de grand luxe, voire princier.

Retrouvé dans les niveaux les plus profonds du puits, à la fois organiques, sableux et semi-humides, ces cuirs étaient associés à du mobilier militaire, parfois domestique et des monnaies royales, principalement du règne de Charles VI. Ils semblent donc en relation avec le premier comblement, “pourrissage” du puits intervenu dans le premier tiers du XVe siècle. Ces cuirs décorés ont pu faire partie d’un vêtement, d’une parure ou d’un objet datable de la seconde moitié du XIVe siècle. Époque faste pour le château, possédé par Jean de Bohème, puis sa fille Bonne de Luxembourg et, ensuite, par Jean de France, duc de Berry et frère de Charles V.

En l’état actuel des études et de la fragmentation, il est difficile d’interpréter de manière certaine l’objet retrouvé. L’une des hypothèses émise rapidement, était d'associer les fragments à un vêtement, une parure ou un harnachement (passe-lacets) militaire (fragments de plaques de cuivre et de rivets sertis). Aujourd’hui, l’examen des dessins d'oiseaux de proie, dont l’un semble chaperonné (petit capuchon posé sur la tête d'un oiseau de leurre), suggère que l'objet pourrait être en lien avec la vénerie. Toutefois, l'absence de petits fragments articulés écarte l'hypothèse d'un gant. En revanche, on sait que les princes de cette époque se déplaçaient avec leurs animaux (transport de chiens lors des chasses d’apparat, déplacement des ours ou des perruches de Jean de Berry,..) : dès lors, il est possible d'émettre l'hypothèse que ces fragments de cuir pourraient être une fauconnière d'éducation ou une housse, un cache-cage pour les oiseaux. Si cette idée est suggérée par le décor lui-même, elle est renforcée par la présence des passe-lacets. Soigneusement fendus, équidistants avec régularité les uns des autres, soulignés par les bandes vermillons, ils auraient alors servis à resserrer la base de la housse sur le pied de la cage.

Au château-résidence de Mehun, la fauconnerie et l'art des oiseleurs devaient être l'un des plaisirs de ce lieu de villégiature. En d'autres points des fouilles, il a été retrouvé un sifflet en terre cuite à la note extrêmement stridente, une vervelle, un nichoir, sans oublier les perruches peintes en bleu-turquoise sur les carreaux de techniques arabo-espagnoles qui ornaient les salles du château.