Le château-musée est bien plus qu’un musée de France !

C’est également un Monument Historique (1840) qui a fait l’objet de 1980 à 1998 de fouilles archéologiques d’un intérêt capital pour la recherche castrale française. Les études se poursuivent et actuellement un vaste projet d’intégration des salles-basses, véritables cryptes archéologiques, au sein du circuit de visite est en cours et lié à l’étude diagnostique des élévations de la tour Ouest…

Dans un premier temps, les décapages sont restés relativement superficiels et les niveaux de démolition du site et de son occupation révolutionnaire ont principalement livré des éléments liés à la construction et au cadre monumental du château résidence du duc de Berry de l’extrême fin du xiv^e siècle. Ceci a permis de saisir toute l’ampleur architecturale du lieu et de comparer les découvertes aux documents anciens. Au nombre de ceux-ci, il convient de citer l’étonnante peinture de la Tentation du Christ des Très Riches Heures du duc de Berry. Le château devient là l’ensemble des trésors proposé par le Diable à Jésus. La seconde image, dite “gravure de Penot” est une représentation du château en 1737. C’est-à-dire après les incendies du xvi^e siècle, mais avant sa démolition de 1796-1815. Remarquable de précision et de finesse de trait, cette représentation montre toute la délicatesse des dentelles de pierre sommitales. Depuis, une quinzaine d’autres représentations du monument plus ou moins réalistes mais toujours parfaitement reconnaissable, ont été découvertes. De Paris à New York et Genève, de nombreux manuscrits, souvent exécutés par l’École de Bourges et à ses suiveurs, renferment des vues de la résidence.

Dans un second temps, les recherches archéologiques se sont concentrées sur les salles basses du monument. Là, mille indices, souvent ténus mais ô combien précieux ont été rassemblés sur les constructions les plus anciennes. Ainsi, nous pouvons aujourd’hui présenter douze édifices, empilés, croisés, enchevêtrés sur le site. Bâtiments en bois et/ou en pierre, posés sur rocher ou juché sur une motte, porteurs de courtines ou bloqués sous de puissantes tours, tissent un étonnant support aux constructions princières des xiv^e et xv^e siècles. Il ne s’agit pas là de proposer une publication virtuelle et détaillée des recherches (cf. Le Château et l’Art, à la croisée des sources, g.h.a.m.y. Mehun, 2011), mais de faire découvrir nos collections archéologiques intégrées en dévolution définitive au sein du musée Charles VII et dont plus de quatre cents éléments d’importances sont exposés.

Souvent, en premier et inconsciemment inspiré par les antiquités découvertes au xix^e siècle, on pense céramique ou lapidaire monumental… Nos collections mehunoises s’ouvrent, avant tout, sur un large panel sculptural, car la résidence médiévale de Mehun était savamment ornée de groupes sculptés d’une rare finesse, réalisé par le sculpteur André Beauneveu et l’École dite de Berry ; par Jean Cambrais, certainement aussi, mais avec moins de probabilité. Les démolisseurs révolutionnaires se sont acharnés pour briser menu, Apôtres, Prophètes et angelots de toutes sortes. Les fragments recueillis n’étant certainement que les oubliés des fours à chaux… Toutefois, la finesse des ciseaux cheminant dans une barbe, le velours d’une joue d’ange ou le modelé des veines d’une main resserrée sur son bourdon, en disent long sur la dextérité des artistes qui ont œuvrés sur le site.

De même, pour la polychromie, précise et vive ; où les jaunes, parfois d’or, tutoient les rouges et les bleus azurs. Justement, le bleu, si difficile à stabiliser, se retrouve sur des carreaux de pavement. Porteurs des emblèmes du prince Jean de Berry, les centaines de fragments de carreaux retrouvés mélangent techniques arabo-espagnoles et tracés français, reflets dorés inconnus en France à cette époque et fleurs de lys royales, dragons de Luxembourg et ours du Berry… Des ensembles colorés qui formaient des tapis aux armes et devises de monseigneur en parfaite concordance avec les vitraux, les tentures et l’architecture en général.

Les fouilles ont livré du mobilier tout aussi exceptionnel que les éléments d’architecture : fragments de cuir, céramiques d’importation, instruments de musique, outils d’artisans ou d’artistes, sceaux administratifs, couteaux à trancher... Notons également que le quotidien des résidents était tout aussi exceptionnel, même, semble-t-il pour des périodes plus anciennes (xi^e – xii^e siècles) : os d’ours, andouiller de cervidé à la ramure d’exception, lancette à saigner en forme de poisson et mille autres objets encore…

120 ans avant la Renaissance, le château-résidence de Mehun de la fin du Moyen Âge n’était qu’un foisonnement de couleurs et un lieu hautement artistique. Étuves, ménagerie, jardins, bibliothèque, chapelle double à étage et hauteur démesurée sont quelques éléments qui composaient ce retrait politique. C’est cette résidence hors du commun que nous vous proposons de découvrir fiche après fiche… N’hésitez pas à revenir consulter nos œuvres, cette mise en ligne est constamment mise à jour, complétée et augmentée.