Musée départemental de la Préhistoire du Grand Pressigny
Des maîtres-tailleurs de silex
Photo d'une des lames du dépôt des Ayez
Dans les fermes et les villages néolithiques du sud-Touraine où un silex de bonne qualité se trouvait aisément, tout le monde pouvait se fabriquer des outils en pierre pour travailler d’autres matériaux comme le bois, les peaux et les végétaux. À la fin du Néolithique (- 2800 / - 2400 ans), après plusieurs générations de tailleurs d’éclats et de lames, des artisans ayant développé un très haut niveau de savoir-faire ont découvert une nouvelle méthode pour obtenir des lames encore plus longues.
Cette méthode de taille, particulièrement adaptée au silex de cette région, a été appelée « livre de beurre » par les préhistoriens, à la suite des agriculteurs tourangeaux de la fin du XIXe siècle qui trouvaient ces curieux objets dans leurs champs. La ressemblance de ces pierres avec les pains de beurre de 500 grammes (soit 1 livre) que les paysans façonnaient dans les moules en bois aux bords crénelés a inspiré cette appellation.
Ces « livres de beurre » correspondent donc au nucléus* restant après le débitage des grandes lames.
Ces lames aux dimensions exceptionnelles, avec des longueurs comprises entre plus de 22 cm à presque 40 cm, étaient ensuite retouchées pour être transformées en de grands couteaux appelés poignards. De si longs objets n’étaient pas indispensables pour répondre aux besoins quotidiens, il s’agissait en fait d’objets de prestige, voire ostentatoires, principalement destinés à des groupes plus ou moins éloignés de la région de production. C’est ainsi que ces objets ont été diffusés dans de nombreuses régions françaises, mais aussi jusqu’en Suisse occidentale, en Allemagne et aux Pays-Bas, soit à plus de 900 km de la Touraine !
La production ayant largement dépassé les besoins locaux, il s’agissait donc d’un véritable artisanat, lié à des réseaux d’échanges organisés à l’échelle de l’Europe de l’Ouest. Le haut niveau de savoir-faire nécessaire à la fabrication de ces grandes lames permet de le qualifier de premier artisanat d’art de Touraine.
*Le nucléus, du latin signifiant « le noyau », correspond au bloc de pierre à partir duquel des éclats ou des lames (plus allongées que les éclats) ont été débités pour faire des outils (grattoirs, couteaux…). Il s’agit d’un déchet de fabrication.
Poursuivez votre découverte :
La caractérisation du silex du Grand-Pressigny :
https://www.persee.fr/doc/racf_0220-6617_1986_num_25_1_2460
Musée départemental de la Préhistoire du Grand Pressigny
Il y a 5000 ans, les premiers artisans tailleurs de pierre, entre Touraine et Europe occidentale
Dans le sud de la Touraine et le nord du Poitou, la qualité du silex a favorisé la venue de groupes humains depuis le Paléolithique. Mais c'est à la fin du Néolithique qu'un artisanat très particulier s'est développé.
Pour aller plus loin : Le dépôt de lames de la Creusette à Barrou (Indre-et-Loire)
A la découverte des lames du dépôt de la Creusette...
Qui possédait ces grands poignards en silex?
Dans les villages, certains membres recevaient les poignards en silex tourangeau. Il ne s'agissait pas d'un outil destiné à chaque habitant.
Remerciements
Le musée adresse ses remerciements aux personnes ayant contribué à cette exposition virtuelle