"Im Bade wannen" Susanne Linke, dans son "projet aquatique", ainsi qu'elle se plait à en parler, recherche à établir le lien entre des forces élémentaires : l'amour, la mort, la vie. Elle s'adonne à une confrontation gestuelle et esthétique ; entre l'impossible histoire d'amour de Penthesilea et Achille, entre la relation de cette histoire à une matière première - l'eau - et ses états d'agrégation : la glaciation, la pétrification, et au-delà de l'eau, tout élément qui se répand et répand la vie, jusqu'à sa dissolution dans une vapeur nébuleuse. Elle tente de surmonter la barrière de la matérialité et s'aventure sur le terrain invisible de l'immatérialité.
"Le Baron perché est l'histoire de Côme Laverse du Rondeau, qui refuse de manger la soupe d'escargots repoussante préparée par sa soeur Battista, à qui son père revêche demande de quitter la table, qui grimpe dans un arbre à l'âge de douze ans et qui, pour le reste de sa vie, ne repose jamais le pied par terre. Le Baron perché (est) une des images les plus inoubliables de rébellion, de refus déterminé, qui existent dans la littérature de ce siècle de rebelles." Les présentations faites par Salman Rushdie* du conte philosophique d'Italo Calvino se passent de commentaire. On ne s'étonnera pas que Francesca Lattuada, venue à la danse après un crochet par le théâtre (l'approche de Kantor et de Grotowski fut décisive), trouve ici matière à alimenter sa nouvelle chorégraphie. Dans son précédent spectacle, Stultifera Navis, elle s'était inspirée de la nef des fous du Moyen-Age et avait confié à l'acteur Denis Lavant le soin de cribler l'espace de la danse des mots acides de Cioran ou d'Emily Dickinson. Et Jean-Marc Zelwer, musicien-complice, s'était attaché à inventer des sons "imaginaires traditionnels" qui nous baladaient d'une époque et d'un pays à l'autre. Cette fois-ci, la forme du spectacle sera celle d'un opéra, un peu forain, un peu bateleur, plutôt archaïque, à l'image de l'art brut de Fernand Léger dont se réclame Francesca Lattuada, avec obstination.
Alles Klar, expression allemande courante, signifie tout est clair, tout va bien, on a compris. En fait, souvent, cette expression révèle plutôt notre incompréhension ou surtout notre manque de volonté de saisir les événements. De même Tout va bien, le film de Jean-Luc Godard signifiait en fait tout va mal. Comment donc appréhender ce que nous exprimons ? Traquer l'âme, au-delà du policé, sera notre mot d'ordre dans ce désordre. Et afin de pousser le paradoxe nous nous servirons en parallèle d'un autre thème de questionnement. De la sensibilité de l'abstraction ou de la mathématique du comportement. Quelles relations entretiennent les chiffres, la géométrie, les cycles, l'aléatoire avec la chair, le physique, le psychologique, le rituel ? Comment et pourquoi l'abstraction est porteuse d'émotions ? Sur quoi comptons-nous ? Quelle est la valeur du geste, à qui appartient-il ? La mathématique, la logique de l'émotion, l'individu. Ces quelques pistes de travail s'effectueront en deux temps : 1. individuellement avec chacun des interprètes pour aboutir à des solos, 2. avec l'ensemble des cinq danseurs.On peut penser que nous serons entraînés vers des formes, des gestuelles à la fois très rigoureuses, mais également hasardeuses, chaotiques. Robert Seyfried
Après avoir chorégraphié et mis en scène Splendid's de Jean Genêt et ShowRoomDummies. La fougueuse équipe grenobloise poursuit sa recherche sur le rapport du corps au corps artificialisé Stéréotypie mène ce qui est humain, irrégulier et accidenté vers la régularité et la perfection d'un « nouveau corps » constitué par des interprètes, des éléments organiques et anthropomorphes, apparemment vivants, et un dispositif de lumières robotisées. Cet univers intègre la proposition visuelle de la plasticienne Vidya Gastaldon et croise à nouveau la puissance du musicien électronique autrichien Peter Rehberg/Pita en association avec les mélodies fragiles delà chanteuse Noriko Tujiko. Stéréotypie met en scène cet idéal d'innovation qui dévoile les limites d'un fantasme de perfection physique et mécanique, mais également toute l'excitation liée à ce fantasme.
Après avoir présenté un travail remarquable à partir de Splendid's de Jean Genêt au théâtre Le Rio à Grenoble, création pour danseurs et mannequins-marionnettes, le Groupe DACM poursuit sa recherche sur le vivant et sa représentation avec ShowRoomDummies.A partir du trouble que peut susciter le mannequin et en s'appuyant sur les textes de W. Gombrowicz et Léopold von Sacher-Masoch, ShowRoomDummies explore les thèmes de la répulsion et de l'érotisme, de la frontière de l'animé et de l'inanimé. Etienne Bideau-Rey est plasticien. L'approche de Gisèle Vienne se fonde sur la littérature, le théâtre et la philosophie. Tous deux sont passés par l'Ecole Supérieure Nationale des Arts de la Marionnette.
Créateur son / Musique : Franck II Louise ; KAPOUDJIAN Noël
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Texte(s) : Nati'k
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Image(s) / vidéo(s) : JACOB Pierre
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Après Kàfig et Récital, le chorégraphe Mourad Merzouki approfondit sa démarche gestuelle dans 10 Versions et impose le hip-hop sur les scènes de théâtre. Dans l'exigence suivie de croiser les pratiques et les genres artistiques, il s'entoure de neuf danseurs et propose dix tableaux sur le thème de la différence. Des textes d'actualité composés par Nati'k servent de fil conducteur à cette histoire, sur la musique originale de Franck II Louise, teintée parfois de flamenco ou de mélopée arabe. Ce spectacle affirme un hip-hop réinventé où la subtilité des gestes et les images vidéo invitent à la jubilation et à la fête. "S'inscrit sur le plateau un ensemble de coordonnées plastiques qui déterminent dix fois de suite, le style et la forme de la danse - break dans la tradition pechue, smurf dans le genre désossé, gestuelle des tours de magie, panoplie acrobate etc. Figures et enchaînements cachés, dévoilés, surexposés, allusifs ou carrément dans le vif de l'humour. Qu'il soit enfiévré ou soudain immobile, qu'il se faufile d'un corps à l'autre, ou fasse front avec fracas, ce hip-hop recomposé est un acte de foi posé fortissimo par un collectif de danseurs fiers de défendre à la fois leur art et leur vie." Dominique Frétard, Le Monde
Chorégraphie(s) : BENAOUISSE Ben ; MEERSSCHAUT Helmut ; VAN KELST Noël
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Créateur lumière : CLAPDROP Wim
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Créateur son / Musique : PYCKE Johan
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Auri sacra famés Après son premier succès Dansé Donsé Dan Dan (1995), Latrinité, le trio de danseurs chorégraphes, a eu la possibilité de travailler chez Victoria à une nouvelle production. De pair avec leur mentor, Ryszard Turbiasz, ils ont réuni et sélectionné une tonne de matériaux, en partant de la nouvelle de Dostoïevski Le Joueur. Le champ de tension entre l'être et le paraître, la bonne foi et l'escroquerie et le jeu avec le public sont des aspects qui les ont particulièrement intéressés. En fait, le jeu du joueur et celui de l'acteur ne diffèrent pas tant l'un de l'autre... Auri Sacra Famés, est une sorte de collage, qui se compose surtout d'improvisations basées sur des choix intuitifs, opérés dans la salle de répétition - le processus de travail intense, si typique du trio. Pour cette production de danse, ils sont partis de la musique du XXe siècle du compositeur russe Chostakovitch et du double monde du jeu, des joueurs et des casinos. De façon très personnelle, mais aussi équivoque, et de temps à autre incroyablement comique, ces trois « personnalités » différentes braquent les feux sur les « manies » très spécifiques du genre humain...
Béjart Ballet Lausanne Le Presbytère n'a rien perdu de son charme, ni le jardin de son éclat Il y a trente ans, Maurice Béjart faisait l'ouverture de la Maison de la Culture de Grenoble. Au moment où celle-ci se prépare à une nouvelle vie, il était bien normal que le plus célèbre des chorégraphes revienne lui insuffler son enthousiasme naturel. Ses ballets sont de plus en plus, dit-il, des rencontres, avec une musique, avec la vie, avec la mort, avec l'amour. Pour Le Presbytère n 'a rien perdu de son charme, ni le jardin de son éclat, il dit avoir eu le coup de foudre pour la musique de Queen. « Je les aime, ils m'inspirent, ils me guident » et se dit sûr que dans le no man's land où nous irons tous un jour, Freddie Mercury se met au piano avec Mozart. Le spectacle est un ballet sur la jeunesse et l'espoir puisque, « indécrottable optimiste, je crois dit-il, que, malgré tout, "the show must go on" ». C.H.B.
C'est lorsqu'elle crée Insurrection au Cargo de Grenoble en 1989, comme un clin d'oeil un peu exaspéré aux fastes commémoratifs de la Révolution française, qu'Odile Duboc est enfin reconnue du grand public. La fluidité discrète de sa gestuelle, en écho à la musique intérieure des corps, propage une émotion farouchement indolente. Une qualité mise en valeur par les lumières magiques de Françoise Michel, sa complice depuis la création de leur compagnie Contre Jour, voici plus de dix ans. Pour le Projet de la matière, un troisième larron les a rejointes, la plasticienne Marie-José Pillet étant chargée de fournir aux danseurs des objets-matière qui n'ont rien à voir avec un décor. Car cette pièce n'existe que dans le rapport interactif entre les gros galets mous qui accueillent le sommeil des danseurs, et leur gestuelle en apesanteur qui évoque tour à tour un bestiaire imaginaire, une peinture de l'Antiquité, les matières molles de Dali ou une partie de trampoline diffusée au ralenti. Cette danse se regarde comme un tableau : on peut prendre le temps de s'attarder sur un détail, se laisser happer par la multitude de sons qui remplacent la musique, et, par là, rejoindre le rêve minéral où sont plongés les danseurs. Une dérive inhabituelle et rare.
Ceux que l'on surnommait les bébés de la danse en 1981 ont suivi un parcours sans faute, émaillé de créations chorégraphiques, de films vidéo, qui les ont menés à la tête du CNDC d'Angers depuis déjà deux ans. S'ils ont donné le nom d'Esquisse à leur compagnie, c'est en hommage à la peinture qui influence leur danse, une peinture figurative marquée par le grossissement et la déformation du trait, et dont les figures maîtresses sont Bacon, Velickovic ou Dado. De même, le cinéma occupe une place non négligeable et lorsqu'ils créent Welcome to Paradise en 1990, l'atmosphère du duo est directement inspirée par le cinéma néoréaliste italien qu'on retrouvera d'ailleurs deux ans plus tard dans Plein soleil. Dans le lyrisme gestuel de cette pièce, on a l'impression que le couple Joëlle Bouvier - Régis Obadia, elle lumineuse et explosive, lui sombre et retenu, prend le parti de se mettre en scène et de se raconter. Retour au groupe pour leur nouvelle création qui réunit neuf danseurs autour d'un travail axé sur " la prise de conscience du corps et du jeu de l'acteur ; une étude physique, étroitement liée à l'émotion, qui utilise divers apports (énergie, poids, espace temporel et relationnel...) susceptibles d'engendrer une force expressive".
chorégraphie de Dominique Bagouet Lorsque m'a été confiée la mission d'inaugurer pour la danse, le plateau du nouvel Opéra de Montpellier, il m'a suggéré une écriture large et plus offensive, pour une équipe importante de danseurs. J'ai osé m'attaquer à cette cantate BWV26 de Jean-Sébastien Bach enregistrée dans une version chère à mon cœur depuis longtemps et que je réservais à ce type d'occasion presque festive. J'ai voulu insérer entre chaque mouvement de la partition classique des jeux sonores provenant de machines industrielles de bonneterie. Laurent Gachet a capté, mixé et arrangé ces rythmes et ces sons directement liés à mon enfance puisque mes grand-père, père et frère ont tour à tour dirigé une petite entreprise textile accolée à la maison familiale. J'ai préparé ainsi, des pages de trames précises de construction chorégraphique, au service d'un vocabulaire soucieux d'énergie et d'exploration souvent individuelle pour les interprètes... Dominique Bagouet.
Ciro Esposito fu Vincenzo. L'oeuvre au noir. Napolitain d'origine, Paco Décina a choisi la France pour développer un travail chorégraphique sensible et esthétique (dans le meilleur sens du terme). TempiMorà, Ombre in Rosso Antico, puis Vestigia di un corpo font successivement connaître l'écriture délicatement posée de Paco Décina, imprégnée de références picturales, de musiques du Sud, où affleure un désir latent sous l'écorce des images. Avec Paco Décina, on peut sans crainte affirmer que la danse, si elle est un art du corps, est aussi un art du regard. Et en des temps, peut-être, de trop grande visibilité, le chorégraphe choisit la pénombre rafraîchissante, il explore la chambre noire de l'être et, sans rien obscurcir de son propos, il met à jour des touches de mémoire, déshabille l'empreinte de la mort pour toucher des zones de sensation au plus profond des consciences. Cette singulière oeuvre au noir visai éveiller de «petites blessures de l'invisible», en donnant l'étrange consistance d'un «temps suspendu, où le vide semble prendre la place des corps lointains dont l'histoire est perdue». Il s'agit, pour Paco Décina, d'une iconographie du possible. L'esthétique qui gagne la danse cesse alors d'être un effet pour s'affirmer comme vision artistique. Avec Ciro Esposito fu Vincenzo, Paco Décina réussit sans doute l'une des plus belles chorégraphies de ces dernières années, en composant une sorte d'opéra où la rumeur recueillie des corps tient lieu de lyrisme, où la nudité portée telle une offrande s'imprime comme un indélébile acte de chaleur humaine.
Artiste(s) / Interprète(s) : BOUVIER Joëlle ; OBADIA Régis ; RONCADGLIO Isabella ; YOUNG Lise ; FAVROU Luc ; LESCURE Frédéric ; MARIE Patricia
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Créateur son / Musique : ROUDIER Patrick
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Créateur lumière : OLIVERO Marc
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Commentaire ; Résumé : La salle est blanche comme un hiver gelé, brillante comme un désert de sel. Ici l'air est d'une blancheur si grande qu'il semble que les murs à chaque instant risquent de s'évanouir. Ici chaque coup marque sa trace, chaque sanglot dessine l'horizon. Courir tellement vite, juste pour entendre rire le vent.
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Présentation. : La Danse aux aguets Que n'a t-on déjà écrit sur Joëlle Bouvier et Régis Obadia, les deux chorégraphes, cinéastes de la compagnie de l'Esquisse, qui ont propagé un style totalement singulier dans le paysage chorégraphique français à travers le monde entier! Bouvier-Obadia, d'abord en duo puis avec des compositions de groupe, ont appris à apprivoiser les ombres furtives qui tourmentent les regards, les douleurs secrètes qui assaillent les corps. La montée de la peur et du désir les trouve aux aguets, et c'est cela même qu'ils rendent visible. "Une femme chaque nuit voyage en grand secret"^, ne déroge pas à cette lumineuse "écriture du désastre " dont ils se sont fait les chantres. Portés par les musiques de Ghedalia Tazartes et Patrick Roudier (avec des incises qui vont de Chostakovitch à Schnittke), et dans la continuité de leurs œuvres précédentes, Bouvier-Obadia et leurs danseurs, arpenteurs inlassables du continent humain,"rejoignent l'antique vie de la danse, fébrile et pure, langage et jeu, mort et résurrection^.
Roger Balavoine, "Paris-Normandie". 23 novembre 1991
Commentaire : A partir de chansons populaires qui trottent dans nos têtes, Dominique Boivin invente avec ses partenaires des duos savoureux et dansants : avec Daniel Larrieu « Les loups » chantée par Reggiani , avec Sylvain Groud « Mon enfance » de Barbara et avec Gisèle Gréau « C’est extra » de Léo Ferré.
