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Tours (37)

Musée des Beaux-Arts de Tours

Bandeau d'illustration de l'espace WM : Musée des Beaux-Arts de Tours
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Olivier Zabat et le Peintre d’Euergidès

Olivier Zabat, Nique 2, collection FRAC Poitou-Charentes
Olivier Zabat, Nique 2, collection FRAC Poitou-Charentes
Peintre d’Euergidès, Coupe de style attique à figures rouges, Tours, musée des Beaux-Arts
Peintre d’Euergidès, Coupe de style attique à figures rouges, Tours, musée des Beaux-Arts

Olivier Zabat, né à Grenoble en 1965  
Nique 2, 1993
Photographie cibachrome, H. 150 ; L. 100 cm
Acquis auprès de l'artiste, 1994
Collection FRAC Poitou-Charentes, n° inv. 994.20.1 

Peintre d’Euergidès (Grèce, VIe s. av. J.-C.)
Coupe de style attique à figures rouges, vers 510 av. J.-C
Céramique, H. 13 ; L. 34 ; P. 42 cm
Collection Campana ; dépôt de l'Etat, 1863 ; transfert de propriété à la Ville de Tours, 2010
Tours, musée des Beaux-Arts, n° inv. 863-2-67

 

 

Né en 1965 à Grenoble, Olivier Zabat est un artiste et réalisateur qui enseigne depuis 2006 à l’École Nationale des Beaux-Arts de Lyon. S’il a aujourd’hui une pratique de documentariste, Olivier Zabat a longtemps travaillé sur le jeu entre la photographie et son titre. Nique 2 est une œuvre représentative de son travail des années 1990, dont le titre provocateur est là pour indiquer ce que l’on doit voir, le sujet n’étant pas immédiatement identifiable.
Cette photographie illustre la réflexion menée par l’artiste sur la limite d’acceptabilité de certains sujets. Il joue ici « sur notre capacité de lecture des images qui touchent à la sexualité » : l’œuvre est réalisée à partir de figures découpées dans un magazine pornographique, placées ensuite sous une tranche de jambon. L’ensemble est disposé devant une fenêtre avant d’être photographié. La lumière extérieure traversant la matière, la silhouette des corps se détache en ombres chinoises, rappelant les figures noires sur fond rouge de la céramique antique. 

La Coupe de style attique à figures rouges du Peintre d’Euergidès (vers 510 avant J.-C) représente dix personnages masculins dont sept nus et en érection. Dans le médaillon central figure un jeune homme également nu, tandis que sur la face externe Dionysos est assis, vêtu, entouré de deux satyres. On trouve ensuite, séparés par des motifs de palmettes, quatre banqueteurs nus (comastes), puis deux jeunes hommes (éphèbes). 

Bien que ces deux œuvres appartiennent à des périodes et des cultures différentes et que le médium ne soit pas le même, leur iconographie les rapproche. L’effet provoqué sur le visiteur est cependant très différent, car plusieurs décalages viennent en perturber la lecture. Par ses dimensions imposantes, la photographie d’Olivier Zabat s’impose brutalement au visiteur sans que la signification sexuelle ne soit évidente au premier regard. Ce n’est pas le cas de la coupe, par nature plus petite et dont les personnages figurés sur la face externe sont de facto moins visibles, mais plus explicites. A cet effet d’échelle s’ajoute un décalage temporel. L’objet antique est le témoin d’un passé extrêmement lointain et d’une culture que nous n’avons pas expérimentée, nous ne sommes donc ni choqués ni outrés par les pratiques d’un autre temps mettant en scène des hommes nus en érection. Nique 2 en revanche est une image pornographique que le temps n’a pas sacralisé et qui est relativement dénuée de vraisemblance. Les figures découpées par Olivier Zabat sont celles d’acteurs qui jouent des scènes pornographiques. Le cliché ne témoigne donc pas d’une pratique sociale, à l’inverse des scènes représentées sur la coupe, qui illustrent les suites habituelles des banquets de l’Antiquité.

Emmanuelle Potdevin