Ville d'Art et d'Histoire

Histoire de Sarlat

Sarlat, capitale du Périgord noir, est un haut lieu historique. Bien que souvent apparentée à la période médiévale, la cité historique présente un patrimoine à l’éventail riche et varié, reflet d’évènements marquants et d’une importante évolution.

 
Le site : une ville en « creux ».
Le nom « Sarlat » vient du latin serrum, « colline » et latum, « large ». Le noyau historique de Sarlat s’est construit dans une étroite cuvette modelée dans les sables et les calcaires du crétacé par le modeste ruisseau de la Cuze. Cette place particulière et cette forme en creux lui vaudra l’installation, au IXe siècle, d’une abbaye à l’origine du développement de la ville. Son extension s’est ensuite opérée vers le nord et surtout vers le sud avec beaucoup de lenteur, créant aujourd’hui une coulée urbaine de plus de 4km.


De la préhistoire au IXe siècle


Les origines de Sarlat sont encore obscures. La citée s’est t’elle formée seulement à partir du IXème siècle autour de l’abbaye ? Des traces d’occupation humaine au sud de Sarlat remontent au paléolithique. Puis, des vestiges gallo-romains attestent de la présence de population avant le Moyen-âge : toponymes gaulois, dolmens à l’ouest, statuettes en bronze de Vénus et de Minerve trouvées dans les travaux du XVIIIème siècle autour de la cathédrale, ou encore, traces d’une voie entre Saintes et Cahors et d’une route secondaire nord/sud entre la Vézère et la Dordogne. Ce carrefour important expliquerait la création de l’abbaye du IXème siècle.


Époque médiévale


Du IXe au XIIe siècle : Relais entre deux sièges épiscopaux importants et lieu de passage obligé entre Cahors et Saintes, une abbaye se construit au IXème siècle. Le premier document conservé la concernant remonte à 954. Cette abbaye atteint son apogée au XIIème siècle, au moment de son agrandissement et de la translation des reliques de saint Sacerdos, évêque de Limoges. Cent moines y vivent. L’abbaye de Sarlat est toujours restée indépendante, directement placée sous la tutelle du Saint-Siège, en dehors de Cluny et de Cîteaux. Saint-Bernard, prêchant contre l’hérésie cathare, en 1147, venant de Bordeaux et se rendant à Cahors accompli le miracle des pains.
De l’abbaye romane qui deviendra un évêché au XIVème siècle, subsistent plusieurs éléments : le clocher-porte, la lanterne des morts, la chapelle Saint-Benoit, la façade de la salle capitulaire dans la cours du cloitre disparu et l’imposte sculptée provenant de l’église Saint-Jean.

 

Du XIIe au XIIIe siècle : Durant cette période, Sarlat va connaitre une émergence importante. Au début du XIIème siècle elle commence à s’étendre du nord au sud. Le premier pôle est constitué de l’abbaye et de son enclos. Dans le courant, du XIIème siècle, un deuxième pôle émerge autour de l’église Sainte-Marie, concentrant rapidement tous les vecteurs religieux, politiques et socio-économiques essentiels à la vie d’une cité. Une première enceinte se dessine et c’est au même moment que les bourgeois et leurs représentants, les consuls, revendiquent leurs privilèges et veulent établir leurs coutumes face à l’abbé. C’est alors en 1223 lorsque l’administration civile est constituée que naît vraiment Sarlat. Au cours du XIIIème siècle, Sarlat devient une véritable cité enserrée par des remparts ; elle compte plus de 5000 habitants.

 

Du XIVe au XVe siècle : Au début du XIVème siècle, le destin de Sarlat évolue : en 1317, l’abbaye est choisie par le pape d’Avignon Jean XXII pour être le siège d’un évêché. Cela répond à plusieurs problèmes : la population se fait plus nombreuse et il faut un meilleur encadrement spirituel sur ces terres qui furent hérétiques. Le nouvel évêché souffre de maux similaires à ceux du monastère (tensions entre l’abbé et les moines). Son territoire est défini en amputant une partie du diocèse de Périgueux à partir de la Dordogne et de la Vézère : il est découpé en sept archiprêtrés et 278 paroisses. A cette époque, les bâtiments de l’ancienne abbaye nécessitent des travaux importants. Ils ne pourront être faits qu’après la guerre de cent ans avec le retour de la prospérité. En dépit de cette pauvreté, certaines figures ecclésiastiques joueront un rôle important sur la scène nationale.

 

La Guerre de Cent Ans : Le conflit féodal et dynastique commence en France en 1317. Sarlat en profite pour renforcer sa cité afin d’assurer ses arrières. Les Anglais sont cependant présents partout, et la ville doit lutter de toutes parts. En 1360, Sarlat connait son premier siège. Par le traité de Brétigny signé en 1360, le grand sud-ouest revient au Roi d’Angleterre Edouard III. Le Roi de France Charles V invite à la désobéissance. L’année d’après, toutes les villes du Périgord lui rendent  hommage sauf Sarlat qui se range du côté des Anglais. Les Français assiègent alors la cité avec quelques 3000 à 4000 hommes. Le traité de Brétigny est rompu en 1370 et les attaques continuent. En plus des pillages organisés dans la campagne, du commerce difficile, des épidémies et d’un taux de mortalité élevé, la défense de la cité coûte chère, et la situation ne s’arrange pas. La ville évolue vers une stratégie plus offensive. Elle devient une place de choix pour le royaume. Elle acquiert durant la guerre une dimension nouvelle. Malgré les destructions, elle sort plus mûre des troubles.

 

Les temps modernes

 

Le XVIe siècle : La nouvelle société qui s’est bâtie au lendemain de la Guerre de Cent Ans est aussi avide d’amélioration de la vie quotidienne que de réussite sociale. Sarlat connait un grand siècle. Cette époque est caractérisée par une éclosion d’édifices religieux et civils. Avec  la nomination d’un évêque florentin, issu de l’influence des Médicis, c’est une chance pour Sarlat. Etienne de la Boétie est un enfant lorsque Nicolas Gaddi s’installe en ville. Sarlat vit sous l’influence des idées humanistes et à l’heure italienne. Mais les guerres de religion annoncent une nouvelle fois des changements pour la ville. Sarlat reste sans surprise fidèle au catholicisme. Cette résistance lui vaut cependant des assauts meurtriers et répétés. Une brève occupation protestante aura lieu mais les catholiques reprennent vite le dessus. Le chanoine Jean Tarde décrit bien cette époque dans ses Chroniques et décrit la ville de Sarlat comme ayant souffert de ces temps de guerre à répétition. L’ordonnance des rues, la disposition des monuments sont inséparables de cet enfermement protecteur sollicité durant des siècles.


Du XVIIe siècle à 1789 : C’est une fois de plus sur une ville ravagée par les guerres que s’ouvrent un siècle nouveau. L’évêque Louis II de Salignac entre 1602 et 1639 favorise l’installation de nouveaux ordres durant la Contre-Réforme ce qui favorise la reconstruction et la rénovation de Sarlat. Les Pénitents bleus et blancs s’installent dans la ville entre 1607 et 1608. En 1694, comme en témoigne Jean Tarde arrivent les Jésuites à Sarlat. Ces installations témoignent du raffermissement de la foi catholique. Cela montre l’urgence de remettre en état les édifices religieux. Mais cet élan est interrompu par la Fronde. Certains évêques tentent de restaurer des monuments et lancent de nombreux chantiers. Seulement, la Révolution Française arrivant, les fonctions de la ville et l’occupation de l’espace allaient changer considérablement.


La Révolution Française : De nombreux monuments religieux mais aussi civils ont souffert durant la Révolution. Les édifices religieux changent parfois complétement de fonction. Entre 1790 et 1796 les terres, les couvents et les églises sont vendus. Sarlat est en incapacité de racheter tous ses biens. Le transfert foncier de l’Eglise à Sarlat reste donc assez peu important. Le parcellaire religieux à cette époque se densifie, et la période révolutionnaire bouleverse l’occupation des sols et la prééminence du bâti religieux.

 

Époque contemporaine


Du XIXe au XXe siècle : Cette époque est marquée par une politique d’assainissement et une transformation profonde de l’urbanisme à Sarlat. Jusque-là, la ville est enserrée dans ses murailles et formée d’un inextricable lacis de rues médiévales. C’est avant tout une politique de salubrité que mène la ville. La grande mutation a lieu suite à une délibération municipale de 1836, décidant du passage de la route départementale par le centre-ville. Une grande artère contemporaine est percée de 1837 à 1865 dans le cœur médiéval : la rue de la République, plus communément nommée « La Traverse ». S’en suivent, sous le Second Empire, d’autres travaux d’assainissement avec notamment la canalisation de la Cuze. La révolution industrielle touche enfin Sarlat de manière très relative et la gare est inaugurée en juillet 1882.
L’activité économique connait aussi un changement considérable durant cette fin de siècle. L’agriculture est l’activité prédominante comme dans le reste du Périgord. Cependant, des implantations artisanales se font plus nombreuses au cours du siècle. La production d’huile de noix à la fin du XIXe siècle prend un caractère quasi industriel. En 1872, avec ses 6200 habitants, Sarlat fait figure de petite capitale urbaine et administrative du Périgord Noir. Les métiers s’y sont diversifiés en réponse à de nouveaux besoins. Les métiers tertiaires se développent en conséquent.
    L’exode rural s’accentuant à la fin du XIXe siècle, les causses du Sarladais sont particulièrement touchés. Les agriculteurs changent de cultures et intensifient la production de tabac. La construction du chemin de fer permet de nouveaux emplois. La Traverse devient une rue commerçante. En 1923, la création d’un syndicat d’initiative marque une volonté d’ouvrir la ville vers le tourisme.


La première moitié du XXe siècle :
La première guerre mondiale : Le 1er août un ordre de mobilisation est donné à Sarlat. Le lendemain plus de 300 hommes se présentent devant l’hôtel de ville. Le 110e régiment d’infanterie est fixé à Sarlat. La ville accueille les premiers réfugiés et met à disposition deux hôpitaux (le collège Saint-Joseph et l’hospice). Les campagnes se dépeuplent avec les levées et les denrées sont rationnées.


L’entre-deux guerres : Sarlat compte alors jusqu’à 30.000 habitants. Cette période marque un essoufflement dans tous les domaines : intensification considérable de l’exode rural, assoupissement de l’activité économique et crise industrielle des années 30. L’immigration est alors encouragée, en 1935 des bretons commencent à s’installer. Malgré cette stagnation économique, la vie culturelle s’intensifie.


La seconde guerre mondiale : A l’aube du 1er septembre 1939, les mobilisations se mettent en place. Le premier exode des populations commence, suivi d’un second plus massif, après 1940, touchant l’Alsace et la Lorraine. Sarlat devient une terre de refuge et d’accueil pour ces populations en fuite. Un premier acte de résistance est enregistré au début de l’année 1941 : Sarlat s’affirme comme une terre de résistance face à l’occupation allemande. Combat et Alliance (deux réseaux de résistance) seront le creuset de l’armée secrète (AS) en Périgord Noir. Sarlat retrouve la paix en août 1944, les Allemands ayant alors quitté le département. Mais ces quatre années furent douloureuses pour la ville. Le monument aux morts recense 318 noms, et à ceux-là convient d’ajouter les 156 déportés.


Une nouvelle Renaissance :
En 1952, nait le Festival du Théâtre de Sarlat, grâce à Jacques Boissarie. Cet héritage populaire de Jean Vilar fait revivre les pierres de la vieille ville en les utilisant comme décor de ses pièces. Au fil des années, ce festival acquiert de l’expérience. Une société indépendante est créée par Jacques Boissarie qui laisse la présidence à Henri de Ségogne. Alain Carrier, affichiste renommé, dessine les affiches et les couvertures des programmes.
L’impulsion de tous ces hommes de culture, permet à Sarlat de bénéficier de la loi Malraux de 1962. En 1964, la ville fait partie des dix premiers secteurs sauvegardés de France. Cette loi permet la restauration d’une partie de la ville, nommée îlot opérationnel, représentant 2ha des 11ha du centre historique. Des travaux de grande ampleur débutent pour plus de dix ans. Le constat retenu en 1975 est particulièrement positif. Cette restauration est bénéfique au développement économique, culturel et touristique de la ville. En 1980 nait le Festival d’automne de la création audiovisuelle, dédié au milieu scolaire et universitaire. Il prend le nom de Festival du Film en 1992.
La ville s’est redynamisée autour de ces trois événements culturels et patrimoniaux marquants, pour devenir aujourd’hui une ville moderne respectueuse de son passé.