Une saisie d’images chez Pellerin en 1815
Jean-Charles Pellerin, le fondateur de l’imagerie d’Épinal, est certainement l’imprimeur de province, qui sert le mieux la propagande impériale. De 1809 à 1814, il édite 38 titres à la gloire de l’Empire : portraits de la famille impériale, scènes et héros magnifiés des guerres impériales mais aussi des feuilles de soldats à découper, Hussards, Chasseurs, Infanterie, Grenadiers, Cuirassiers, Dragons…
Cette implication de Jean-Charles Pellerin dans la diffusion de feuilles de propagande napoléonienne le place, au moment de la Restauration de la monarchie en 1815, dans une situation inconfortable. Il est dénoncé en juin 1815 auprès du préfet de Saône-et-Loire par un client de Châlon-sur-Saône qui l’accuse de lui avoir livré un certain nombre d’images prohibées. Quelques jours plus tard, le 5 juillet, la maison Pellerin, logement, atelier et boutique compris, est cernée et perquisitionnée de la cave au grenier. Plusieurs centaines d’images de l’armée impériale sont saisies mais toutes avaient été caviardées, c’est-à-dire que les aigles et autres signes impériaux ont été recouverts de noir sur les feuilles imprimées tandis que les bois étaient échoppés. En revanche quelques taille-douce éditées à Paris par Noël frères, et parmi elles le portrait de Napoléon Ier, sont retrouvées dans la chambre de Marguerite, la fille de la famille. Jean-Charles Pellerin écrit - mais trop tard - à ses clients, les priant de faire disparaître des images le moindre signe du gouvernement de Bonaparte ou de les supprimer de la vente. Les clients de Pellerin sont perquisitionnés à leur tour et de nombreuses images sont saisies à Troyes, Besançon, Amiens, Langres, Annonay…
Jean-Charles Pellerin est jugé et condamné en février 1817 à quatre mois de prison, à 600 francs d’amende et à régler les frais du procès. Il fait appel et obtient la grâce du Roi pour une remise de peine, laissant à sa charge l’amende et les frais de procès.
Nous devons avouer que cette saisie est une chance… Grâce à elle, le catalogue de vente des images proposé par la fabrique de Pellerin, établi en 1814, est réquisitionné. Il nous apporte aujourd’hui une photographie de la production de l’imagerie, il nous renseigne aussi sur les choix de l’imprimeur. Les commandes des clients de Pellerin saisies avec les images nous permettent de déterminer avec précision l’aire géographique dans laquelle l’imagier diffuse ses images, avec qui il travaille... Enfin le Musée de l’Image conserve la totalité des feuilles napoléoniennes produites par Pellerin avant 1815, les seules existantes dans les collections publiques.
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